J’ai découvert Stanislas Moussé grâce à un client. J’aime beaucoup ces partages qui se font au coin d’un rayon, qui ouvrent les portes de la curiosité, où le libraire reçoit tout autant qu’il donne. Et sur ce coup là, j’ai reçu un sacré cadeau!
Stanislas Moussé dessine, au Rotring (cela parait important pour que tout les journalistes le soulignent, je fais pareille, même si je n’ai jamais tenu un tel stylo en main mais là pourront se dire « les vrais savent ») Donc Stanislas Moussé dessine, au Rotring, des pages entières de foultitude de détails, d’aventures, d’émotions, de rebondissements, de poésie, sans aucun texte.
Il crée des albums à la beauté singulière et bouleverse le 9ème art! Romans graphiques hors norme, atypiques, s’adressant à l’âme d’enfant qui sommeille au fond de vous et qui ont provoqué en moi un vrai choc!
Débutée avec Longue Vie, sa saga Héroïque Fantastique Médiévale Épique est un conte en noire et blanc, sans aucun texte et où chaque planche semble se suffire à elle-même.
Longue Vie
Il était une fois un monde pacifique, où les hommes vivaient en harmonie avec la nature et les bêtes. Un beau jour, une armada d’êtres mi-hommes mi-bêtes débarque, pillant tout sur son passage. Un berger, dont la famille a été massacrée, réclame vengeance. C’est pour lui le début d’un long périple où l’attendent des ennemis toujours plus monstrueux et des périls toujours plus effroyables…
Stanislas a séjourné plusieurs été en Valais où il a travaillé comme berger dans nos beaux alpages. Peut-être faut-il chercher par là une inspiration à son épopée graphique? Ses vaches sont un très bel hommage à nos reines.
Son héro vit tranquillement dans sa montagne, en famille jusqu’au jour où des écorcheurs massacrent tout le monde. Lui, près de ses vaches, a tout vu. Alors il s’arme d’une hache et part chercher vengeance! Il n’aura aucune pitié pour les meurtriers mais ressort gravement blessé de ce combat. Notre berger est recueilli par une troupe de chevalier et apprend avec eux les campagnes guerrières contre d’autres clans. Rivalité, invasion, soumission, barbarie, tout y passe jusqu’à ce qu’il soit capturé. Il échappe de peu à une exécution. Dans sa fuite il va fonder sa propre Dynastie, devenir Roi sans pour autant renié ses origines.
Un scénario qui semble bien archétypal et pourtant c’est tout le contraire. De par sa forme, muette, de par son dessin a la fois minutieux et naïf, souvent burlesque. Le récit est limpide, d’une efficacité chronologique redoutable et en même temps on embrasse le temps d’une vie tout entière.
Longue vie est un bijou de cap et d’épée, de poésie et d’art!
Le fils du roi
Longue vie racontait la vie d’un homme qui, de modeste berger, devient un roi puissant. Cette véritable « saga », au sens littéral, s’achevait sur la mort du roi et l’héritage qu’il laissait à sa descendance, après une vie de péripéties et de batailles.
Stanislas Moussé décide, dans Le fils du roi, de nous raconter l’histoire de cette descendance, du fils du roi. Avec lui, c’est tout à la fois un nouvel héros qui se révèle, un nouveau destin qui se joue et le trait, le style, de Stanislas Moussé qui s’affirme, se renforce, frappe l’œil.
Un géant enchainé dans un temple, une épée de légende gardée par un monstrueux cyclope, c’est au fils du roi de l’affronter! Ivre de colère, le géant va briser ses chaines et n’aura de cesse de pourchasser le voleur! Cet ogre est la parfaite incarnation du mal, dévorant tout sur son chemin! Le dessin obsessionnel de Stanislas donne une forme de douceur à la violence du récit. Il évolue dans la mise en page pour proposer plus de cases que dans son premier tome. Sous vos yeux ce joue une fable de toute beauté!
Mater
Un mal étrange et profond ronge le château familial et s’attaque aux héritiers de la dynastie du roi. Alors que le royaume est en danger, c’est une femme, une mère, une magicienne, qui va entamer un combat avec les forces obscures pour la survie de son enfant et de sa lignée.
Mater continue la saga épique initiée avec Longue vie et poursuivie avec Le Fils du roi.
Alors toujours pas de mots ? Non. Toujours pas. Avec un style néo-ligne claire, des planches grouillantes de détails et un imaginaire épique étonnant, Mater confirme le talent de Stanislas Moussé, qui utilise l’humour et un trait naïf pour mieux décaler les codes du genre de l’heroic fantasy. Toujours armé de son Rotring 0.2, Stanislas Moussé tisse, de livre en livre, son improbable tapisserie de Bayeux.
Cette saga n’est pas le coup d’essai de Stanislas Moussé. Son premier album est Chaos, le récit d’un peuple paisible qui se voit submergé et détruit, par vagues successives, par leurs alter-égos maléfiques et géants. Jusqu’à ce que les vecteurs du chaos en deviennent aussi les victimes… Dans un monde indéfini et miniature, les peuplades qui le composent, et qui s’y confrontent et s’y affrontent selon un schéma manichéen, font résonner la définition originelle du « chaos », celle de l’univers avant l’intervention divine. Publié en 2018 aux Éditions Super loto
Mais revenons au sujet de cet article parce que je peux pas ne pas vous parler des Éditions Le Tripode, qui ont signé le triptyque Moussé. J’aime profondément cette maison d’édition qui prend un soin fou à choisir ce qu’elle va ajouter à son catalogue. Ils publient peu mais c’est à chaque fois un enchantement. Laissez-vous surprendre par leurs choix et embarquez dans leur monde!
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