Le monde sans fin

Jancovici, Blain & Iron Man

Le Monde sans fin, miracle énergétique et dérive climatique
La rencontre entre un auteur majeur de la bande dessinée, Christophe Blain, et un éminent spécialiste des questions énergétiques et de l’impact sur le climat, Jean-Marc Jancovici.
Le projet: un roman graphique, une bande-dessinée documentaire, une vulgarisation d’analyses de polytechnicien et un ouvrage amusant sur un sujet inquiétant.

Christophe Blain

Souvent cité comme l’auteur de BD le plus doué de sa génération, Blain commet bon nombre de méfait depuis 1995. Il collabore avec le non moins talentueux David B pour les aventures d’Hiram & Placido et continue son bonhomme de chemin en participant aux excellent Donjon Potron-Minet. C’est sur Isaac le Pirate et Gus que Blain se lance seul dans la BD.

Pour En cuisine avec Alain Passard et Quai d’Orsay, Christophe Blain se place en interlocuteur d’un expert. Dans le rôle du naïf, il permet le questionnement et la vulgarisation d’un sujet de par ses questionnements et son coup de crayon. C’est à cet exercice qu’il s’amuse à nouveau dans Le monde sans fin.

Jean-Marc Jancovici

Spécialiste des questions énergétiques et climatiques, ingénieur, conférencier et enseignant, il est aussi l’inventeur du « Bilan Carbone ». Déjà auteur de quelques ouvrage dont Le changement climatique expliqué à ma fille ou encore Dormez tranquilles jusqu’en 2100.

Ce sera donc lui l’expert de cet album à qui Blain posera foultitude de questions, d’angoisses, de préoccupations et confrontera quelques idées reçues.

Intelligent, limpide, non dénué d’humour, cet ouvrage explique sous forme de chapitres les changements profonds que notre planète vit actuellement et quelles conséquences, déjà observées, ces changements parfois radicaux signifient. Jean-Marc Jancovici étaye sa vision remarquablement argumentée en plaçant la question de l’énergie et du changement climatique au coeur de sa réflexion tout en évoquant les enjeux économiques (la course à la croissance à tout prix est-elle un leurre ?), écologiques et sociétaux. Ce témoignage éclairé s’avère précieux, passionnant et invite à la réflexion sur des sujets parfois clivants, notamment celui de la transition énergétique.

Déguisé en Iron Man caricaturé, Blain incarne l’Homme en tant que Super Héros parce que l’Homme peut tout faire: voler, résister aux températures extrêmes, soulever des charges incommensurables mais aussi détruire ou sauver le monde…

Si le sujet est grave, les auteurs prennent le parti pédagogique d’en sourire. Apportant une vulgarisation bienvenue à toutes ces questions complexes, les graphiques, chiffres barbares et autres éléments ardus deviennent limpides.
Pour qui a déjà écouté les conférences de Jancovici, il retrouvera son goût du paradoxe et son amour profond de l’exactitude. Si certains peuvent arguer que cet album est une tribune aux théories du conférencier, il n’en reste pas moins qu’elles sont prouvées scientifiquement et qu’elles ont l’avantage de pousser à la réflexion et qu’en plus elles proposent toujours des choix.
Grace à des données précises et chiffrées et ce dialogue ouvert, on ressort de notre lecture mieux informés et, pour ma part, peut-être pas rassurée mais en tout cas un peu moins inquiète.

Je laisse le mot de la fin aux deux auteurs dans un dialogue savoureux:

Ce qui nous rend individualistes c’est que l’aide des autres n’est plus indispensable pour assurer notre subsistance – en apparence.

– Ton comportement de consommateur t’affranchit de coopérer. Tout devient tellement facile… Si la technique ne peut plus assurer notre sécurité, il faut la retrouver dans l’entraide. La résilience n’est pas de compter uniquement sur tes propres forces mais de créer un réseau. On sait que l’ancien système ne marchera plus longtemps.Il faut croire et agir pour des choses qui ont des chances de se réaliser… Affronter ensemble les problèmes et se mettre d’accord sur les modalités.

Tu veux dire, qu’on soit tous d’accord avec toi et on sera sauvés?

-Généralement, c’est ce que pensent les gens qui disent qu’il faut se mettre d’accord tous ensemble.

Hahahahah!