J’en parlais déjà ici, mais désormais les allergiques à la langue de Shakespeare pourront découvrir les méfaits dingues de Lobo, l’Homme, le mec plus ultra !
En ces temps glorieux de fêtes de Noël, quel dommage cependant qu’Urban n’ait pas jugé bon d’inclure Le noël de Lobo, fable hardcore dans laquelle les enfants trucident leurs parents si les cadeaux ne leur conviennent pas… Parents qui, du coup, en appellent à l’intervention musclée de Lobo, qui défouraille les garnements à coups de pompes dans les dents ! Mais en attendant, la branche comics de Dargaud nous offre enfin, après des années de disette, une intégrale de 2 mini-séries majeures du personnage le plus déglingué de l’univers DC.
Dans la première histoire, nous découvrons la tragique histoire de Lobo, né sur la planète Czernia, petit paradis utopique. Ayant oublié le concept même de violence, cette contrée placide voit naître une créature barbare et teigneuse, dont la légende dit qu’elle rendit fou la sage-femme, et tua toute la population de la planète à guère plus de 10 ans, en riant. Lobo, c’est une teigne, une créature potentiellement aussi puissante que le plus puissant des superhéros. Il a juste décidé de s’en foutre, et de vivre pour rigoler. Butter des gars pour du pognon, faire le fou avec ses poteaux dauphins de l’espace, annihiler des planètes pour le fun, le train de Lobo roule avec fureur sur les rails de l’hyperviolence la plus crasse. Mais un jour, par on ne sait quel hasard, il rejoint une équipe vaguement héroïque, qui finit par le tenir quelque peu en laisse. Plus de meurtre à la commande, un salaire de misère, tout ça car il a perdu (en fourbe) face au boss de l’équipe, et que quand Lobo annonce qu’il obéira s’il perd un combat, Lobo tient sa promesse. Mais sa nouvelle mission s’avèrera une épreuve inattendue. Alors qu’une biographie non autorisée raconte sa vie dans le détail, il doit escorter une vieille rombière, une momie lyophilisée, son pire cauchemar d’enfant : sa maîtresse d’école, seule survivante du génocide dont il est l’auteur, et toujours là pour lui apprendre à bien se tenir… Le drame ? Il a promis de la ramener vivante…
La seconde histoire va bien plus loin dans la folie furieuse : chargé par un vieux béguin de ramener un taulard ayant rompu sa conditionnelle, il va tomber sur un os. Face à lui se trouve une espèce de golgoth surpuissant, ayant déjà décimé une petite armée de chasseurs de caution, et tout Lobo qu’il soit, après un combat proprement homérique, il va se faire dérouiller comme un bleu et, le tronc séparé des hanches et la tête remplie de balles, va se retrouver à poireauter dans une salle d’attente céleste… Et Lobo au paradis, évidemment que ça ne fonctionne pas. Mais quand même le diable n’en veut pas, et qu’il se met à décimer tout ce que le monde des esprits compte de petits fonctionnaires, il faut bien le renvoyer sur terre… Un peu changé, peut-être…
Comme on s’en rend vite compte, alors que ces résumés me semblent foutraques à moi aussi (foutraque étant un tic de langage adopté par la traduction française, plutôt réussie par ailleurs, et signée Edmond Tourriol), Lobo, c’est une ode au joyeux n’importe quoi. Violent, sanglant, volontiers de mauvais goût et jouant plus souvent qu’à son tour de l’absurde, cette création de Keith Giffen et Roger Slifer a connu des hauts et des bas. Les hauts sont en partie regroupés ici, les bas, c’est un peu tout le reste depuis la fin des années nonantes… Surtout le dernier relooking du personnage, qui en a fait un drôle de gaillard vaguement efféminé, au charisme de bulot. Et si les hauts, ce sont ces histoires dingues des années 90, ce n’est pas pour rien.
Quand Giffen décide d’offrir une histoire complète à ce personnage juste improbable, il ne voit qu’un seul dessinateur apte à relever le défi. Il s’agit bien de l’incroyable Simon Bisley, enfant illégitime de Frank Frazetta, ayant biberonné du Métal Hurlant trop jeune, et fait le bonheur des lecteurs de 2000AD en Grande-Bretagne. Son trait maîtrisé mais ultra nerveux, ses personnages body-buildés incroyables, ses compositions syncopées en font l’artiste idéal pour un personnage aussi hardcore que Lobo. Le résultat est donc une sorte d’instant de grâce du mauvais esprit, trash, brutal, jubilatoire, et drôle à en crever.
Marvel a Deadpool, son héros frappadingue et psychotique, qui est actuellement l’une des stars maison. Mais DC a Lobo, et il serait bon qu’elle s’en souvienne, car il est bien plus grand, bien plus taré, bien plus radical que son ninja de compère…
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