Il en est sorti, de bonnes choses en BD, cette année. Du comics, du manga, de la BD dite classique, de l’indépendant… Mais si un sujet a retrouvé des couleurs, c’est bien le western ! Gentiment désuet au cinéma, célébré pour ses relectures post-modernes (du western spaghetti de Sergio Leone aux westerns frappadingues de Quentin Tarantino), le western n’a jamais vraiment déserté les étals des libraires BD. Blueberry, puis Durango ou Bouncer ont tenu haut le flambeau du crépuscule des cowboys. Cette année 2015 a vu plusieurs parutions ou rééditions majeures, qui relancent l’intérêt pour les stetsons et les santiags !
Xavier Dorison est de ces auteurs un brin vexants, qui réussissent à peu près tout ce qu’ils entreprennent. Ayant démarré sa carrière par le thriller historique, il a depuis signé des séries qui sont devenues des classiques ou au moins des succès de librairie. Jugez plutôt : Le troisième testament, Sanctuaire, WEST, Long John Silver, Asgard… Il revient ici au western traditionnel, dans la droite lignée de Charlier et Giraud sur BlueberryRalph Meyer (Berceuse assassine, IAN, Asgard). Du tout grand western, qui annonce la couleur dès ses couvertures, splendides.
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Pierre Dubois est un auteur que l’on n’attend pas forcément sur un western. Venu du merveilleux, il est depuis près de 40 ans elficologue, et non des moindres. Scénariste prolifique en BD, il a néanmoins signé des séries dans des genres variés. Dimitri Armand, de son côté, est au début de sa carrière, et vient plutôt de la fantasy (Angor). Ils se sont alliés ici pour raconter les aventures houleuses de Sykes, un shérif itinérant, appelé à la rescousse lorsqu’une ville subit le joug de hors la lois inarrêtables. Il part en chasse des assassins d’une jeune veuve, et se retrouve à trimballer l’orphelin, lui aussi décidé à tuer ceux qui ont tué sa mère… Un album crépusculaire et dense, des personnages attachants mais vénéneux, une fin sanglante : Dubois et Armand frappent fort, et signent une histoire complète redoutable !
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Changement d’ambiance ! Les frères Maffre (dont Julien a notamment signé les dessins du premier diptyque de La Banque) imaginent le parcours sombre et angoissé d’Elijah Stern, un croque-mort au passé lourd dont le présent n’est guère reluisant. Embauché par la veuve d’un homme retrouvé mort dans un lupanar, il est chargé de pratiquer une autopsie en dehors du cadre de la justice. Et ce qu’il découvre ne correspond évidemment pas aux résultats de l’enquête officielle… Sorte de dérivé western des Experts, ce polar narquois est un whodunit de premier choix, et renvoie l’improbable héros vers son enfance tragique. Le titre le plus atypique de la sélection, mais non le moindre !
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Profitant probablement de leur travail de re-scannage des originaux de Giraud, les éditions Dargaud sortent ces deux rééditions en très grand format (40×30 cm) et en noir et blanc de deux albums mythiques. Alors que Gir, désormais seul aux commandes après la mort de Charlier, était peu à peu avalé par Moebius, ces deux histoires sombres et flamboyantes revisitent le mythe Blueb, et lui permettent de se réapproprier son héros. Une leçon d’histoire de la BD, en même temps qu’une leçon technique, puisque les reproductions permettent de profiter des petites scories visuelles qui disparaissent généralement à l’impression : ratures, coups de gouache blanche pour effacer telle ou telle erreur, personnages découpés et repositionnés… Des livres qui se décortiquent comme des reproductions d’Art, et plus comme de simples albums…
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Avec près d’une année de retard, Dargaud publie enfin le troisième volume de son intégrale Blueberry… Et pour se faire pardonner, le quatrième sort en même temps ! Toujours aussi complet, avec des bonus copieux et intéressants, une impression aussi bonne que possible, et la frise au dos des volumes qui commence à prendre forme… Une édition pour bibliophile, comme Dargaud, Dupuis et le Lombard le font désormais très bien !
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