Alex inclina son gobelet contre le sien pour une rencontre dérisoire de plastique bon marché.
« À la tienne. »
Alex but son verre cul-sec et il l’imita.
« C’était une bonne idée, dit-elle. De quitter la ville.
— Ouais ? » dit le type en enregistrant le sourire chaleureux d’Alex, son maillot de bain. Elle sentit qu’il se détendait, passant d’une légère confusion à une amabilité stupéfaite, la volonté d’accepter l’idée qu’ils s’étaient déjà rencontrés quelque part. Ça se passait toujours de cette façon : Alex s’approchait suffisamment pour que les gens la remarquent, pour qu’ils soient mal à l’aise. Ensuite, il était facile de transformer ce malaise en adrénaline, en intérêt, en bienveillance.
Lors d’un dîner, un faux pas aux lourdes conséquences
L’invitée d’Emma Cline est le cinquième livre de la romancière américaine, sept ans après son premier roman à succès The Girls. Ce nouveau livre est une exploration de la solitude et de la dérive d’Alex, protagoniste de 22 ans. Dès les premières pages, Cline nous transporte à Long Island où nous suivons la jeune femme invitée par son ami quinquagénaire, Simon. Cependant, après avoir commis un faux pas lors d’un dîner, Alex se retrouve soudainement indésirable. Éconduite, elle décidera de rester à Long Island plutôt que de rentrer à New York.
De jeunes femmes buvaient des flûtes de champagne en affectant un air maussade et remontaient leur robe d’une main, ce qui leur aplatissait la poitrine. Elles avaient abandonné une partie importante d’elles-mêmes, disposées à se laisser entraîner dans la direction qu’on leur suggérait ; peu importe, en réalité, qui les abordait.
En dépeignant le quotidien d’Alex, ses errances et ses rencontres, l’autrice nous offre une plongée poignante dans la psyché d’une jeune femme perdue et abandonnée. À travers elle, Cline explore la vulnérabilité et la solitude d’une arriviste malchanceuse. Mais aussi l’ambiguïté de ses relations amicales et amoureuses. L’écriture de Cline est subtile et introspective, et sa capacité à décrire les sentiments et les émotions d’Alex est remarquable.
Une réflexion profonde sur une «lutte des classes» qui ne dit pas son nom
Bien que ce roman soit le plus sombre de tous ses ouvrages, il n’en reste pas moins une œuvre littéraire significative. Cline offre une réflexion fascinante sur les choix et les conséquences de nos actions. Aussi, sur les ravages du déni, cet aveuglement tantôt volontaire, tantôt inconscient.
De toute façon, la plupart des gens n’éprouvaient pas ce qu’ils étaient censés éprouver. L’amour était une sorte de mot fourre-tout dont la simple évocation était suffisante, une façon d’éviter de reconnaître ce que vous ressentiez réellement. Ce serait plus simple pour Jack s’il n’en espérait pas autant, s’il comprenait que ces mots n’étaient qu’un simulacre de sens, pas le sens lui-même.
En fin de compte, L’invitée est un roman poignant et pénétrant qui explore l’échec inéluctable d’une transfuge de classe. Ce roman confirme que Cline est une autrice talentueuse, capable d’aborder des thèmes complexes avec subtilité et émotion. En somme, L’invitée est une œuvre littéraire à ne pas manquer pour tous ceux qui aiment les romans psychologiques contemporains.
Disponible à la Fnac à partir du 18 mai.
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