Vous connaissez certainement Diglee, autrice et illustratrice, pour avoir déjà croisé son talent puisqu’elle gribouille depuis longtemps ! Elle illustre des ouvrages écrits par d’autres : la géniale série jeunesse des Quatre sœurs, les excellentissimes ouvrages d’Ovidie et bien d’autres mais elle signe également ses propres publications comme la géniale trilogie de Cléopâtre Wellington, le somptueux Ressac et, fraîchement débarqué en librairie, son nouveau Je serai le feu aux merveilleuses Éditions La Ville Brûle.
Je serai le feu est une anthologie de la poésie féminine qui n’est pas une anthologie.
Diglee baigne dans les poèmes depuis son enfance, les rimes et les métaphores l’ont toujours accompagnée mais elle réalise, il y a quelques années, qu’elle ne connait pas de poétesses. Terrible, effrayant, incroyable pour cette féministe engagée, curieuse et passionnée. Alors elle prend comme prétexte l’Inktober, défi artistique en vogue sur les réseaux sociaux. L’Inktober consiste à publier un dessin par jour pendant le mois d’octobre, alors Diglee s’emploie à découvrir, lire et illustrer un poème d’une femme. C’est un monde merveilleux qui s’ouvre à elle, tant et si bien qu’elle renouvelle le challenge plusieurs années de suite. Je serai le feu est une compilation de ses découvertes et de ses illustrations, un voyage fabuleux dans un univers foisonnant, sublime et émouvant.
Dans son ouvrage, Diglee a sélectionné des poèmes, beaucoup méconnus, certains traduits ici pour la première fois, de cinquante autrices toutes plus extraordinaires les unes que les autres. Peut-être vous rappelez-vous mon challenge littéraires des Sorcières. J’ai découvert tellement d’autrices incroyables par cet exercice que je comprends parfaitement les sentiments de Diglee dans sa quête poétique. En plus de nous offrir des textes précieux, l’autrice nous présente toutes ces femmes de Lettre. Elle ne se prétend pas historienne et ce sont des portraits personnels et émotionnels qui vous sont proposés et vous charmeront sans aucun doute.
J’étais heureuse de retrouver l’incontournable Emily Dickinson, la bouleversante Anna Akhmatova, mon éternelle Anaïs Nin, la déchirante Sylvia Plath, la magistrale Andrée Chedid, les puissantes Maya Angelou et Audre Lorde et l’inégalable Patti Smith. Tant d’autrices chéries, admirées qui accompagnent ma vie, picorant leurs mots dès que mon âme s’assombrit. Ce sont des amies fidèles, rassurantes et inspirantes qui viennent d’être rejointes par tant d’autres grâce à Je serai le feu.
J’ai aujourd’hui, auprès de moi de nouvelles confidentes et ne remercierai jamais assez Diglee de m’avoir fait connaitre l’improbable Claude Cahun, la tragique Catherine Pozzi, la délectable Joyce Mansour, l’émancipée Marie Krysinska ou encore Claude de Burine, incroyable, fantastique, merveilleuse Claude de Burine…
Ouvre les portes de la nuit
Tu trouveras mon cœur pendu
Dans l’armoire odorante de l’amour
Pendu parmi les robes roses de l’aurore
Mangé par les mites, la saleté et les ans
Perdu sans vêtements, écorché par l’espoir
Mon cœur aux rêves galants
Vit encore.
Herbes – Joyce Mansour
Si l’on parle de moi,
Je me cacherai sous les violettes
Et deviendrai
Le scarabée d’or.
Si l’on me touche
Je serai la musique qui tourne
Au-dessus de vos saisons de Mai.
Si l’on m’aborde,
Je serai le feu.
La Voyageuse – Claude de Burine
Tes yeux bleus, à travers leurs paupières mi-closes,
Recèlent la leur des vagues trahisons
Le souffle violent et fourbe de ces roses
M’enivre comme un vin où dorment les poisons…
Vers l’heure où follement dansent les lucioles,
L’heure où brille à nos yeux le désir du moment,
Tu me refis en vain les flatteuses paroles…
Je te hais et je t’aime abominablement.
Cri – Renée Vivien
Je serai le feu est un ouvrage magistral, une pépite, un recueil précieux qu’il faut avoir dans sa bibliothèque et même, sur sa table de chevet. Il vous faut lire Je serai le feu, à haute voix, à la lueur d’une bougie dans le silence de la nuit et vous laisser envahir par la beauté des mots et la puissance de leurs autrices !
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