Clara lit Proust de Stéphane CARLIER
Cindy Coiffure, un salon parmi d’autres
Madame Habib, née Jacqueline Delage, veille au grain pendant que Clara, Patrick et Nolwenn pomponnent une clientèle d’habituées.
Chalon sur Saône sert de décor à ce récit attachant d’une éclosion par la littérature.
Clara, 23 ans, n’avait jamais songé que l’oeuvre de Proust lui était destinée.
Pourtant, après qu’un mystérieux client part en laissant derrière lui un exemplaire d’ « Un Amour de Swann », Clara découvre Proust.
De l’autre côté du miroir
La coiffeuse aux amours pâlissantes se prend de passion pour les intrigues de Guermantes.
Elle se plonge dans un texte dont même les interminables phrases réputées difficiles lui procurent du plaisir, une fois apprivoisées.
Le rythme qu’il impose est ce qu’elle apprécie le plus chez lui. Il oblige à une lenteur mais aussi à une vigilance, c’est très particulier. Combien de fois, pendant sa lecture, son esprit a quitté les mots pour se lancer dans une liste de courses ou lui rappeler une conversation qu’elle avait eue dans la journée au salon. Lenteur et vigilance, détente et concentration. Proust, c’est son yoga
Elle entreprend la lecture de toute la Recherche, irrésistible immersion dans un univers parallèle où elle se re-découvre.
Petit à petit, sa perception du monde autour d’elle change et s’enrichit.
Une mue s’opère. A quel papillon donnera naissance la chrysalide ?
Elle n’imaginait pas écouter plus longtemps ses parents et JB débattre des avantages comparés du livret A et de l’assurance-vie, et encore moins les accompagner lors de la promenade à pas lents qui va suivre, alors que le baron de Charlus vient de faire son apparition dans la Recherche comme une grosse mouche qui se pose sur une boule de mozzarella.
Une vocation est née
À l’instar de sa cliente Claude devenue Claudie, autre passionnée de Proust qui l’accompagnera dans son épanouissement, la jeune coiffeuse se transforme.
Elle profitera d’un festival de théâtre pour se lancer dans la lecture publique de morceaux choisis de la Recherche du Temps Perdu, façon Fabrice Lucchini (coiffeur lui aussi dans sa jeunesse, tiens, tiens…)
Epilogue
Point d’orgue d’un parcours captivant, la visite de Clara, bien des années plus tard, sur les lieux où sa vocation est née m’a ému.
Stéphane Carlier réussit là un très bel hommage à la puissance de la littérature, et nous convainc que Proust n’a pas perdu une once d’actualité malgré les années (voir interview ici)
Magistral !
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