Beyrouth-sur-Seine de Sabyl Ghoussoub
Je me suis souvent demandé pourquoi on ne retourne pas vivre au Liban même si la réponse est en partie assez simple : c’est l’argent qui nous retient. J’ai quitté ce pays car je n’arrivais plus à y gagner ma vie. Mes parents ne sont jamais retournés y habiter car ils ne savaient plus, des années après leur départ, quel métier ils allaient pouvoir exercer pour vivre convenablement. Quand on fait partie de la classe moyenne, ce pays ne veut pas de nous, il nous détruit et nous broie à petit feu et si, en plus, nos métiers sont des métiers sans le sou, assistante pour ma mère, traducteur pour mon père, écrivain pour moi, on peut dire adieu à ce pays. Qu’on le veuille ou non, l’argent guide nos vies.
La peur d’une nouvelle guerre, aussi, me retient de retourner m’y installer. Chaque matin, je me réveille et je prie, avant de prendre mon portable et d’observer les notifications des journaux libanais, de ne pas lire ces trois mots : guerre, au, Liban.
Dans le doute, il faut interviewer ses propres parents
Longtemps Sabyl Ghoussoub, alors qu’il était enfant, a cru que son père était espion, et sa mère…prostituée.
Ensuite, à l’âge adulte, muni d’un micro en bonne et due forme, il se décide à les interviewer pour en avoir le coeur net.
Pour résultat, il nous livre cette biographie emprunte d’amour filial et de mal du pays, justement remarqué par le jury 2022 du Goncourt des lycéens.
Merci WhatsApp
C’est ainsi qu’on suit les péripéties du couple parental, Kaïssar et Hanane, installé à Paris depuis 1975, pour leurs études.
Par la suite, tous les moyens sont bons pour garder le contact avec la famille restée au pays.
En conséquence, la mère deviendra experte dans le maniement des réseaux sociaux, seuls à même d’abolir les distances.
Paris, capitale médiatique du moyen orient
De son côté, le père écrit pour la presse arabe, foisonnante à Paris dans les années 80.
Sabyl Ghoussoub lui consacre sans doute les plus belles pages de ce vibrant hommage à ses parents.
J’ai, comme lui, un faible pour les cafés miteux. J’aime siroter un serré au bar du coin avec les poivrots du quartier. Comme mon père, c’est dans cet environnement que je me sens le plus à l’aise, parmi les « petites gens que nous sommes et que nous resterons en France » m’a-t-il déjà dit.
En fin de compte, voici un émouvant témoignage de l’exil sans fioritures ni pathos à savourer sans hésitation.
(Afin de feuilleter un extrait, vous pouvez cliquer ici).
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