L’Iran, ou la Perse au choix, pays d’environ 1 648 000 km2 renferme pas moins de 80 096 604 habitants. Sur ce nombre, imaginez combien sont menacés, enfermés, battus, épiés étroitement par le régime ou écrasés sous le poids des traditions ? Depuis 2009 et la réélection à la présidence de Mahmud Ahmadinejad, la surveillance est renforcée, les sanctions tombent plus rapidement que les fruits mûrs tombent d’un arbre et la répression alliée à la violence font loi.
Dans tout cela, les jeunes tentent de construire et vivre leurs vies, leurs passions, leurs envies et surtout, leur amour. Et c’est cet axe de recherche que Jane Deuxard et Zac Deloupy ont choisi d’emprunter pour se faire les témoins (en « caméra cachée ») de la régression conservatrice de ce pays attaquant de plein fouet les droits de l’homme.
Ce couple de journalistes a voyagé à de nombreuses reprises en Iran, se déclarant mariés (seul moyen de louer une chambre d’hôtel) et touristes. De cette façon, ils ont pu approcher un grand nombre de jeunes, célibataires ou en couple, sans trop éveillé les soupçons des patrouilles de police ou les Bassidji (qui sont partout et tout-puissants).
Et ce sont ces rencontres, avec des iraniens entre 20 et 30 ans exclusivement, que ces deux auteurs nous dévoilent dans cette BD. Ils répondent, par ce biais, à la question : comment vit-on dans une République islamique comme l’Iran ? Comment conjuguer entre l’envie naturelle de sortir, fêter, rire ou flirter et l’interdiction ferme de s’adonner à toutes ces activités. Comment envisager un avenir lorsqu’on grandit dans un pays où depuis de nombreuses années le régime et la tradition sèment la peur et la colère ?
Leur quotidien ? Les mariages arrangés, les certificats de virginité, les contrôles incessants, la violence, l’enfermement. Le régime intervient à tout niveau, il décide de valider un cursus étudiant, de laisser perdurer ou non un secteur d’activité, l’important étant que rien ne lui échappe. Et c’est cette main mise sur tout et tout le monde que l’illustrateur Zac Deloupy traduit magnifiquement dans cette bande-dessinée. Des représentations parfois imagées qui traduisent avec puissance une réalité. Des mères pieuvres, des mollahs dominateurs, des pièges tissés parfaitement…
Le découpage de ce reportage illustré est également parfaitement réussi. A mi-chemin entre un carnet de voyage et une bande-dessinée, chaque interviewé possède son propre espace, comme un cahier dans lequel vous vous plongez et qui vous donne un accès directe à l’intimité et au quotidien des iraniens et iraniennes.
Une œuvre journalistique instructive, percutante et un choix de support (la BD) qui permettra de mettre ces infos entre de très nombreuses mains. Merci à eux pour les risques pris pour nous transmettre cette réalité en 2016, à seulement quelques heures de nos pays si démocratiques….
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