La science-fiction fait sa rentrée chez Dargaud
L’avenir, un sujet fascinant et infini pour les auteurs de bandes dessinées. En septembre 2019, les éditions Dargaud nous offrent plusieurs Visions du futur en six BD d’auteurs. Si la science fiction s’attelle depuis de nombreuses années à imaginer le futur de l’humanité, les avancées technologiques et les enjeux environnementaux actuels permettent une actualisation de « l’Homme du futur ».
L’avenir selon Ludovic Rio
Aiôn
Le capitaine Lexi Neel voyage seule avec son androïde quand celui-ci la réveille de sa longue phase d’hyper-sommeil. Un message d’alerte a été émis depuis une colonie qui étudie le fonctionnement de l’espace-temps. Lexi se rend donc là où le scientifique est mort en laissant un carnet avec un langage crypté.
Peut-on voyager dans le temps ? Une question centrale dans les œuvres de science-fiction et dont la mécanique a connu de nombreux fonctionnements que ce soit au cinéma ou en littérature.
Dans un huis clos anxiogène à des années lumières de la Terre, Lexi notre héroïne va devoir tout faire pour rester en vie et découvrir ce que cachait le scientifique.
Couleur froide pour une ambiance glaciale et déserte sous le crayon clair et direct de Ludovic Rion. L’illustrateur qui travaille pour le journal Fakir officie avec succès dans la bande dessinée et nous offre une première vision du futur de l’homme et de l’émancipation possible des intelligences artificielles. Le scénario prenant et pertinent nous donne envie de connaitre les autres surprises que nous réserve Dargaud dans cette nouvelle collection.
L’humain
Diego Agrimbau & Lucas Varela
Robert et June sont mariés et férus de sciences. Cryogénisés, ils patientent le temps que la planète Terre redevienne habitable.
Des centaines de milliers d’années plus tard…
Tous les hommes sont morts, la nature a repris doucement ses droits. Pour nos deux amoureux, il est l’heure de rentrer. Quand Robert atterrit sur Terre, il découvre avec bonheur que leur plan un peu fou a fonctionné. Mais l’espoir est de courte durée. En se rendant à la capsule de sa femme, arrivée des années avant lui, il fait une terrible découverte. Elle est morte. L’amour de sa vie n’est plus là et leur projet de repeupler la Terre : anéanti.
Face à la douleur Robert perd pied. Quel intérêt pour lui d’être le dernier humain sur une Terre peuplée de créatures étranges? Mort à l’intérieur mais puissant à l’extérieur, il règne en maître sur les robots qu’il avait mis au point avec son épouse. Très vite, il devient cruel, brutal et zèle. Même seul, l’homme est destructeur. Mais June a laissé des messages vidéos à destination de Robert. L’intégration de l’homme dans une nouvelle nature, la pertinence de la survie de l’homme, ses droits… la remise en question commence… Leur projet n’était-il pas dangereux?
Une planète rouge et grise dessinée par Lucas Varela l’illustrateur de Michigan. Sa ligne claire est épurée, ses couleurs hypnotiques et déstabilisantes. La planète bleue est méconnaissable. Le dessin se veut alarmant et colle parfaitement au scénario de Diego Agrimbau. C’est les déviances psychologique et la définition de l’humanité qui sont questionnées dans cette bande dessinée profondément humaine.
Univers !
La vision d’Albert Monteys
Loin de l’atmosphère froide et sérieuse des deux premières bandes dessinées de la collection, Univers! est une explosion de couleurs et de fantaisies. Dans cet Univers, les androïdes se sont intégrés parfaitement à notre vie. Hommes et robots vivent en harmonie tout du moins en apparence.
Plusieurs scénettes se succèdent sur des thèmes variés qui ont tous un point commun : l’intégration de robots dans notre quotidien qui remplaceront petit à petit les humains et les interactions sociales réelles. Au programme, voyages intergalactiques à la recherche de formes de vie, un PDG sans limite qui veut être le premier à breveter le voyage dans le temps … Chaque épisode est indépendant, mais conserve des liens avec les autres.
Si la qualité du scénario de chaque histoire est inégale, l’ensemble est réussit et détonne avec les deux précédentes Visions du futur. Loin d’une ambiance plombante, c’est l’humour et le ton sarcastique d’Albert Monteys qui font la force de cette bande-dessinée.
Couleurs vives, dialogues à la limite de l’absurde, scénario déjanté. C’est ce qui vous attend à la lecture de cette BD divertissante et malgré tout optimiste qui n’oublie pas de nous faire réfléchir sur les sujets sérieux cachés derrière l’humour.
Tremen
Le petit bijou de Pim Bos
Comment caractériser l’indéfinissable Tremen? Des planches grises, brumeuses, un mutisme oppressant, un univers désolé et froid. Et malgré l’absence de dialogue, les personnages sans voix hurlent leur souffrance. La douleur est présente à chaque page. Le poids des dérives du pouvoir dans une bande dessinée monochrome.
Si Tremen est une vision du futur, c’est seulement un miroir du présent, les couleurs de la nature en moins. Oppression, violence, individualisme : seuls rescapés d’un monde parti en fumée.
Pim Bos signe un chef-d’oeuvre et la qualité de son coup de pinceau n’est plus à démontrer. Son cavalier erre dans un monde complètement détruit, où la solitude et la haine se donnent la réplique.
L’univers de l’auteur néerlandais n’est pas sans rappeler celui du réalisateur de Stalker, Andrej Tarkovski. Un clin d’œil à la célèbre peinture d’Edward Hoper, Pim Bos affiche ses inspirations dans cette ode à la mélancolie.
De quoi se questionner sur notre avenir en attendant (im)patiemment la sortie des deux dernières visions du futur.
Soon de Thomas Cadène et Benjamin Adam (en librairie le 11/10)
Mécanique céleste de Merwan (en librairie le 27/09)
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