Slasher psychologique
Un roman époustouflant que je n’ai pas pu lâcher! Il m’a fallu trois jours, dont un dimanche entier pour en dévorer les 540 pages et voilà plus d’une semaine que je bûche pour vous écrire cet article. Parce que j’aimerai vous transmettre tout le génie que renferme ce roman, toute la finesse de son écriture et que c’est compliqué de le faire sans vous gâcher la surprise!
Publié en 2010 au Japon, devenu phénomène de société il est adapté en film par le remarquable et controversé Takashi Miike et en manga et ce sont les Éditions Belfond qui nous le propose en français pour cette rentrée littéraire 2022.
Construit en deux partie, la première s’emploie à distiller tout le génie du professeur Hasumi. Au lycée Shinkô Gakuin de Machida, ville provinciale de Tokyo, il est le professeur le plus charmant, le plus séduisant, le plus charismatique. Véritable enseignant dévoué tant à sa mission de façonneur d’esprits qu’à la vie quotidienne de ses élèves et au bon fonctionnement de l’établissement. Le jeune homme est fin, drôle, toujours prêt à voler au secours des uns, à aider les autres, à combattre les injustices et le harcèlement, à dénouer les conflits. Ses collègues l’admirent, ses élèves l’adorent.
On comprend au fil des pages qu’Hasumi a façonné sa classe, comme une expérience scientifique: choisissant avec soin ses élèves. Ainsi, il est le professeur principal d’un groupe constitué des têtes brûlées du lycée mais également des premiers de classe, d’une fine équipe fidèle à sa personne et de quelques jeunes fragiles qu’il peut aider et contrôler. En fait, Hasumi contrôle tout le monde. C’est son but ultime, son réel plaisir dans la vie: le contrôle.
Par un fin jeu de stratégie, il se rend utile, voir indispensable dans leur quotidien. Il est charmant et méthodique, amusant et compréhensif, autoritaire et juste.
Dans un lycée japonais, votre fonction ne s’arrête pas quand sonne la cloche. Votre travail fait partie intégrante de votre vie, au delà des horaires, au delà du salaire, c’est un titre. La vie du Japonais est régie par ce principe: vous êtes. Ce qui engendre des situations qui n’arriveraient jamais sous nos latitudes. La sphère privée n’a pas les même contours et l’investissement personnel pas du tout le même. Tout le système éducatif est basé sur l’obéissance, l’empathie et des valeurs de coopération, que ce soit entre élèves ou professeur. Un établissement scolaire se doit de fonctionner avec ces valeurs et Yusuke Kishi s’emploie a pervertir tout cela. C’est très amusant à lire et c’est un terrain de jeu très riche pour notre professeur…
Leçons pour faire du lycée où vous travailler votre royaume:
Ne pas se précipiter
Se rapprocher de ses collègues et de ses élèves
Les étudier méthodiquement
Construire son réseau d’informateurs
Trouver les failles de chacun
Avancer ses pions
C’est à ce moment-là que vous pourrez éliminer les nuisibles et chasser les indésirables
Quand tout ceci est mis en place, que l’auteur vous a présenté toutes les personnalités et leurs fêlures, les liens qui les unissent ainsi que les dessins de chacun, que toute la face sombre du professeur Seiji Hasumi vous à été instillé, la seconde partie du roman peut s’ouvrir.
Et là opère le génie d’écriture de Yuskue Kishi.
Vous avez échafaudé des plans, imaginé des atrocités, vous attendez fébrilement que l’ignominie se déroule sous vos yeux parce que vous avez compris que Hasumi est un monstre. Manipulateur, calculateur, pervers et prêt à tout pour assoir son pouvoir! Un être violent qui élimine quiconque se met en travers de sa route. Sa route? Encore et toujours, prendre le contrôle! Et là encore, Yusuke Kishi m’a bluffée. Parce que je ne m’attendais pas à cette apothéose. J’avais imaginé bien pire, bien plus dégouttant, bien plus glauque… Du coup je me demande si le monstre ce n’est pas moi! J’avais imaginé pire mais moins fou! Parce que cette fin est folle! Génialement folle! Un terrifiant jeu de chat et de souris qui vous emporte dans une frénésie hallucinante de violence pure!
Et c’est géniale!
Le talent de Yusku Kishi est dans son style d’écriture effrénée, sa narration fluide et dans la psychologie de ses personnages. Il construit un roman sidérant où le lecteur prend plaisir à découvrir les mécanismes d’un psychopathe! La leçon du mal n’est pas un roman gore, c’est un roman violent, intense et cynique sur nos masques sociaux!
Laisser un commentaire