La collection Aire Libre a, à mon sens, une vraie force : elle intègre des bandes dessinées dont les sujets sont engagés, pointus mais malgré tout à la portée de tous. Les oeuvres qui composent cette collection portent souvent sur les conflits internationaux, économiques, militaires et politiques. Elles nous poussent à ouvrir nos ordinateurs, tablettes et autres facilitateurs de recherches sur le net pour « voir plus loin ».
Aujourd’hui c’est la BD « les larmes du seigneur afghan« , illustrée par Campi et co-écrite par Vincent Zabus et Pascale Bourgaux, qui attire mon attention. En premier lieu, qui sont les auteurs ? Vincent Zabus a écrit plusieurs bandes dessinées dont une, assez récente, qui vous aura peut-être marqué(e-s) : Les Petites Gens, dont l’illustrateur était déjà Thomas Campi. Ils s’associent à nouveau et ajoutent un 3e acteur, non des moindres, Pascale Bourgaux.
Cette dernière est un grand reporter connue pour son documentaire sur l’Afghanistan post-talibans (si tant est que cette description soit juste…). Elle a rencontré et suivi à de nombreuses reprises un chef de guerre nommé Mamoud Hassan, compagnon d’armes de Massoud et qui a lutté en 2001 contre l’arrivée au pouvoir des talibans. Il a contribué à la mise en place d’une démocratie et est, entre autre, pour l’accès à l’éducation des filles de son pays. Il a accueilli et protégé la journaliste belge et lui a permis de nous montrer une autre réalité de ce pays et du contexte historique.
Dix ans après, Pascale Bourgaux souhaite faire un point sur la situation de l’Afghanistan via le prisme du village de Dasht-e Qaleh, duquel Mamoud Hassan est le chef respecté et suivi. Elle fut plus que surprise de se rendre compte que la pression, l’insécurité, étaient plus fortes en 2010, alors qu’un état démocratique et une aide internationale sont mis en place, qu’en 2001 où la lutte contre les talibans était à son apogée.
Et l’explication, ou les explications, à cette situation sont inquiétantes et déroutantes. Des membres de la famille du chef de guerre lui-même penchent pour une retour de ce qu’ils appellent les « nouveaux talibans », avec pour espoir qu’ils ramènent la croissance, l’argent et la nourriture, ce malgré les conséquences autres qui en découleraient. La démocratie pour eux est associée à famine, pauvreté
Ce reportage nous laisse entrapercevoir comment la misère et la pauvreté sont un terreau de choix pour les extrêmes et la violence. Il nous permet de nous interroger sur notre rôle dans les conflits internationaux qui semblent toujours tellement loin de nous (à torts) et nous ouvre également une porte sur la réalité du métier de grand reporter, ses risques, ses injustices, ses motivations.
Quoiqu’il en soit, bravo à ce trio pour la parution de cette nouvelle BD estampillée Aire Libre et merci de nous pousser à nous interroger et à réfléchir sur des sujets que l’on a tendance à rapidement balayer pour ne nous concentrer que sur notre environnement proche.
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