Véritable évènement éditorial, All you need is kill se distingue de plusieurs manières : d’une part, Kaze édite enfin du Takeshi Obata (auteur de Hikaru No Go, chez Tonkam, mais surtout du hit Death Note et du joli succès Bakuman chez Kana), ce qui semble logique, puisqu’il est la branche française de la Shueisha, qui édite Obata, en règle générale. D’autre part, ce diptyque sort en parallèle du film qui est aussi adapté du light novel originel (toujours publié, plus discrètement, chez Kaze), Edge of Tomorrow, grosse machine hollywoodienne avec Tom Cruise et Emily Blunt. Et enfin, il profite du talent de designer de Yoshitoshi ABe, véritable star au Japon, et chara-designer sur des anime aussi emblématiques que Serial Experiments Lain, NieA_7 ou encore Haibane Renmei. Il est aussi auteur complet sur le manga jeunesse Lucika Lucika. Bref, on le voit, toutes les conditions sont réunies pour faire de cette courte série un joli succès public. Mais en terme de qualité, quid ?
Keiji est un jeune soldat prometteur, mais encore inexpérimenté. Dans ce monde futuriste, la Terre est envahie par des extra-terrestres teigneux et particulièrement brutaux, les Mimics. Le seul moyen de s’en débarrasser étant une forme de combat au corps à corps, avec un armement aussi massif que destructeur, Keiji appréhende son premier jour de bataille. Arrive le jour J, pendant lequel il combat aux côtés de Rita, jeune combattante d’élite ayant tué à elle seule des dizaines de Mimics, et étant d’ores et déjà une légende pour les autres soldats. Malheureusement, au cours d’une manœuvre désespérée, il meurt au combat… Pour se réveiller, à la veille de cette première bataille, le souvenir de sa mort encore frais, et connaissant par avance tous les évènements de la journée. Keiji est dans une boucle temporelle, à lui de découvrir pourquoi, et comment en sortir !
D’une histoire relativement simple, et plutôt classique pour un habitué de la SF, les auteurs maitrisent de bout en bout leur narration, profitant à plein du format court de ce manga. En effet, en deux volumes, difficile de se répéter, malgré la boucle qui revient sans cesse sur la même journée. On apprend à connaître Keiji puis Rita, leur évolution mentale est progressive et bien vue, et peu à peu, le lecteur appréhende les tenants et les aboutissants de cette étrange situation. La fin, parfois décriée, est pourtant dans la droite lignée de l’histoire, et reste parfaitement cohérente. Le romancier parle désormais d’écrire une suite à son premier livre, peut-être un second cycle viendra donc récompenser la patience des frustrés ?
Graphiquement, si le design de ABe est soigné, on apprécie surtout toujours autant la patte incroyable de Obata. Ses personnages sont vivants, évidemment classes et beaux (ou belles), et sa maestria passe aussi par des séquences de combat proprement époustouflantes. L’évolution du style sur le champ de bataille de Keiji est ainsi frappante, et le duo qu’il finit par former avec Rita est un régal visuel, dos contre dos face à des hordes d’ennemis. Là où le dessinateur prouve, une fois encore, son immense talent, c’est bien entendu dans l’alternance combat/pause, et la fameuse répétition des évènements de cette journée. On ne se languit jamais de la fin d’une séquence en sachant ce qui s’y déroule, car l’auteur enrobe tout ça avec intelligence, et nous amène où il veut que l’on aille. Comme souvent, l’apparence de Rita, frêle et bien jeune (environ 19 ans) est une licence poétique, car elle se bat avec une hache proprement monstrueuse… Il faut donc accepter ce genre d’entorse au réalisme, ce qui, avouons-le, n’est guère difficile, dans une histoire de science fiction.
All you need is kill, avec son titre engrish et sa frénésie visuelle s’impose comme une réussite, évidente et percutante. Décidément, les grosses sorties manga ne déçoivent guère, ces derniers temps ! (cf mes dernières chroniques).
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