En 2007, les Éditions La Découverte lance un nouveau catalogue sous le Label Zone. Centré sur la contre-culture, l’activisme et les nouvelles formes de contestation et les théories critiques, le fil conducteur de son catalogue est la résistance à l’oppression, qu’il s’agisse d’en décrire les nouvelles formes, d’en retracer l’histoire, d’en révéler le fonctionnement et les techniques, mais aussi d’esquisser, à travers le récit des anciennes luttes et des conflits du présent, d’ici et d’ailleurs, le visage d’une nouvelle gauche de combat et d’ouvrir la voie à des alternatives. L’objectif de Zone ? Promouvoir une recherche ouvertement située et militante.
Leurs publications sont belles, couvertures ultra-graphiques aux titres accrocheurs et ludiques. Leurs contenus sont d’utilité publique, pertinents, impertinents, ils amènent a penser sur notre rapport au monde, à réfléchir, à se questionner. Petit tour d’horizon sur un Label qui me tient à cœur.
Sarah Barmak – Jouir En quête de l’orgasme féminin
Le tout dernier né chez Zones est un essai sur la sexualité féminine. Est-elle vraiment libérée, cette sexualité ? On serait tenté de croire que oui. Pourtant, plus de 50 % d’entre elles se disent insatisfaites, que ce soit à cause d’un manque de désir ou de difficultés à atteindre l’orgasme. Si tant de femmes ordinaires sont concernées, peut-être qu’elles n’ont rien d’anormal et que ce n’est pas à la pharmacie qu’il faut aller chercher la solution. Le remède dont elles ont besoin est plus certainement culturel, et passe par une réorientation de notre approche androcentrée du sexe et du plaisir.
Reportage, essai et recueil de réflexions à la première personne, cet ouvrage enquête sur les dernières découvertes scientifiques ayant trait à l’orgasme féminin.
Que veut dire jouir? Est-ce que l’orgasme féminin est le même pour toutes ? Est.ce que les femmes sont vraiment compliquées? La jouissance a-t-elle sa place dans la culture? Pourquoi l’orgasme serait-il le but de toute relation sexuelle ? 200 pages tour à tour instructives, drôles ou émouvantes dans lesquelles Sarah Barmak démonte les mythes les plus tenaces sur la supposée complexité du plaisir féminin.
« Au commencement était la vulve et l’humanité lui vouait un culte » c’est par cette phrase que Sarah Barmak vous invite à un voyage en Terre de jouissance qui est amusant et urgent de lire.
Mona Chollet – Chez soi, Une odyssée de l’espace domestique
Ce fut ma première rencontre avec Zones et ainsi que je découvrais Mona Chollet. Quand je tombais sur ce bouquin ma curiosité fut piquée à vif, moi la casanière à forte propension pour faire la fête.
Le foyer, un lieu de repli frileux où l’on s’avachit devant la télévision en pyjama informe ? Sans doute. Mais aussi, dans une époque dure et désorientée, une base arrière où l’on peut se protéger, refaire ses forces, se souvenir de ses désirs. Dans l’ardeur que l’on met à se blottir chez soi ou à rêver de l’habitation idéale s’exprime ce qu’il nous reste de vitalité, de foi en l’avenir.
Ce livre voudrait dire la sagesse des casaniers, injustement dénigrés. Mais il explore aussi la façon dont ce monde que l’on croyait fuir revient par la fenêtre. Difficultés à trouver un logement abordable, ou à profiter de son chez-soi dans l’état de « famine temporelle » qui nous caractérise. Persistance du modèle du bonheur familial, alors même que l’on rencontre des modes de vie bien plus inventifs…
Autant de préoccupations à la fois intimes et collectives, passées ici en revue comme on range et nettoie un intérieur empoussiéré : pour tenter d’y voir plus clair, et de se sentir mieux. Une analyse qui questionne nos modes de vie, nos choix, nos contraintes et ce qui reste de nos vies sociales hyperactives lorsque qu’on est seul chez nous. Habiter sa maison c’est s’imprégner son lieu de vie, faire corps avec lui, se l’approprier, mais en a-t-on encore vraiment le droit aujourd’hui ?
Ne sommes nous pas dans un mode de consommation supplémentaire en vivant « chez nous »? Décoration, bibelot, matériel hi-teck et injonction Ikeaesque ne font-ils pas ne nous des vitrines, recopiant le vu et déjà vu, rassurante mascarade permettant de se croire dans le juste ? Qui vit ici, quel rôle est endossé, quelle tâche est dévouée a qui ? Quand est-ce qu’internet est utile, quand est-ce qu’il permet au monde d’envahir une intimité ? A quoi pense un architecte en créant une maison ? Nos logement répondent-ils à de réels besoins ou à des normes sociétales ?
La plume de Mona Chollet est vive et riche, son essai l’est tout autant. Au travers de son expérience personnelle et de références fouillée, elle nous adresse une question profonde : Quand est-ce que le « chez-nous » nous ressemble vraiment ?
Edward Bernays – Propaganda Comment manipuler l’opinion en démocratie
« LE manuel classique de l’industrie des relations publiques » selon Noam Chomsky. Voilà… Il ne m’en fallait pas plus… Je suis une inconditionnelle de Noam Chomsky. Quoi que je lise de lui ou que je l’entende parler, j’en ai pour des jours de réflexions et de remises en questions intellectuelles… Il pose toujours le doigt sur ce qui me dérange ou au contraire, il lève un voile sur des idées bien arrêtées que j’estimais justes. Mais revenons à Propaganda ! La propagande est un sujet qui m’intéresse particulièrement, parce qu’elle a permit de faire passer tant de choses atroces dans l’Histoire et qu’elle continue de manipuler les foules. J’aime comprendre comment on amène le peuple allemand à suivre Hitler tout comme on me conditionne au quotidien pour consommer. Les ficelles sont les mêmes, les concepts et les éléments de langages également. Rien que cela est déjà fascinant.
Véritable petit guide pratique écrit en 1928 par le neveu américain de Sigmund Freud, ce livre expose cyniquement et sans détour les grands principes de la manipulation mentale de masse ou de ce que Bernays appelait la « fabrique du consentement ». Je vous conseille d’ailleurs vivement de lire ce livre…
Comment imposer une nouvelle marque de lessive ? Comment faire élire un président ? Dans la logique des « démocraties de marché », ces questions se confondent.
Bernays assume pleinement ce constat : les choix des masses étant déterminants, ceux qui parviendront à les influencer détiendront réellement le pouvoir. La démocratie moderne implique une nouvelle forme de gouvernement, invisible : la propagande. Loin d’en faire la critique, l’auteur se propose d’en perfectionner et d’en systématiser les techniques, à partir des acquis de la psychanalyse.
Un document édifiant où l’on apprend que la propagande politique au XXe siècle n’est pas née dans les régimes totalitaires, mais au cœur même de la démocratie libérale américaine. Pour approfondir encore le sujet je vous conseille également ce documentaire tourné par les Mutins de Pangée
Rasmiq Keucheyan – La nature est un champs de bataille Essai d’écologie politique
Cet essai novateur de théorie politique fournit une grille de lecture originale et critique, indispensable pour saisir les enjeux de la crise écologique actuelle. À travers l’exposition édifiante des scénarios capitalistes face au désastre environnemental, il fait œuvre – salutaire – de futurologie critique. Face à la catastrophe écologique annoncée, les bonnes âmes appellent l’humanité à « dépasser ses divisions » pour s’unir dans un « pacte écologique ». Rasmiq Keucheyan s’attaque à cette idée reçue. Non, il n’y aura pas de consensus environnemental. Loin d’effacer les antagonismes existants, la crise écologique se greffe au contraire à eux pour les porter à incandescence. Si vous voulez savoir où un stock de déchets donné a le plus de chances d’être enfoui, demandez-vous où vivent les Noirs, les Hispaniques, les Amérindiens et autres minorités raciales. Interrogez-vous par la même occasion sur le lieu où se trouvent les quartiers pauvres… Ce « racisme environnemental » qui joue à l’échelle d’un pays vaut aussi à celle du monde. Une géographie de la pauvreté, des faibles et des armées qui donne froid dans le dos mais permet surtout de se questionner sur notre rapport politique face à la Nature. Entre l’analyse sociale des individus et les spéculations gouvernementales, se glisse la vision écologique du monde du point de vue des armées. Armées qui ont depuis longtemps anticipé les contraintes climatiques qui impacteront (et impactent déjà) directement son action. Je ne pensais pas être innocente ou ignorante sur les questions d’écologie et ce qu’en font les gouvernement mais grâce à cet essai, j’ai appris que le racisme environnemental existe et c’est d’un regard encore plus affûté que je traite dorénavant l’actualité.
Mona Chollet – Sorcières & Beauté fatale
Je vous en parlais dernièrement ici et ne peut que vous conseiller de lire ces deux fantastiques essais sur la condition féminine !
Manon Labry – Riot Grrrls Chronique d’une révolution punk féministe
Et c’est ici que je vous raconte mon coup de cœur pour Riot grrrls et vous invite à plonger dans l’histoire de ce mouvement musical et féministe.
Laisser un commentaire