On en arrive aujourd’hui à la troisième et dernière partie de cette trilogie consacrée à la rédemption dans le roman noir.
Penchons-nous donc sur Une question de temps, ce deuxième roman de l’américain Samuel W. Gailey, auteur de Deep Winter,
sorti en poche récemment chez Gallmeister, dont je vous parlais déjà juste ici.
Alice, vingt-et-un ans, n’arrive à se sortir de l’esprit le tragique incident qui l’a brusquement fait sortir de l’enfance. Ayant fui sa famille peu après, elle erre de ville en ville et surtout de bar en bar en accumulant les petits boulots et les gueules de bois qu’elle arrive désormais à classer sur une échelle de 1 à 5.
Se sentant coupable de l’accident, elle préfère s’oublier dans l’alcool et quitte la ville lorsqu’elle sent une trop grande attache se créer entre elle et tout autre être humain.
Son jeune âge n’enlève en rien le poids qu’elle s’inflige sur les épaules.
Un matin, elle se réveille avec un terrible mal de crâne, aucun souvenir de la veille, son patron mort dans son lit et un sac rempli de billets à ses pieds.
Sentant venir sa chance de pouvoir se refaire et s’installer dans un endroit enfin tranquille, Alice fuit.
Seulement, le propriétaire de l’argent va se lancer à ses trousses et la course-poursuite les emmènera dans les coins reculés de l’Amérique profonde et au plus loin de leur âme.
Ici, le concept de rédemption est plus diffus. Alice ne cherche pas nécessairement à réparer ce qui ne peut l’être, mais plus à s’oublier dans un quotidien d’alcool et de solitude.
La tristesse qui parcourt ses journées nous est envoyé en plein visage avec la violence des maux de tête que notre héroïne ressent à chaque réveil.
Pas de morale manichéenne en ces lignes, la gentille a des failles et le méchants des raisons. C’est d’ailleurs ce qui rend ce roman particulièrement intéressant, cette perspective de ne jamais savoir de quel côté se situer, de ne pas pouvoir imaginer le déroulé de la page suivante.
Les thèmes abordés sont également plutôt variés, que ce soit la perte de repères, la brutale fin de l’enfance, la condition de la sexualité dans les états du sud, la place des parents dépourvus de ressources face à l’absurdité et la violence du monde….
C’est profond, facile à lire, prenant, c’est bien.
Extrait: Boire pour oublier les erreurs en série qu’elle avait commises au fil des ans, surtout la grosse. La grosse erreur qui avait donné naissance à toute cette connerie. L’alcool remplissait son rôle l’espace d’un moment – il l’engourdissait – mais le lendemain matin, les regrets étaient de retour. Ils faisaient leur grand retour. Elle revoyait l’accident, encore et encore, aussi net que s’il s’était produit la veille.
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