Deux nouveaux romans de Nicolas Feuz, un nouveau Joël Dicker, le nouveau Minier … Les noms habituels occupent le devant de la scène littéraire. Mais pourquoi ne pas creuser un peu plus et découvrir deux pépites, plus discrètes mais pas moins merveilleuses ?
Comme des frères
L’adolescence par Claudine Desmarteau
L’iconoclaste : une maison d’édition résolument moderne qui plonge dans l’ordinaire pour en sortir de la noirceur. Après La vraie vie d’Adeline Dieudonné et Sale Gosse de Mathieu Palain, c’est au tour de Claudine Desmarteau de nous embarquer dans un univers de skateboards, de bières et de barbecues improvisés.
Un groupe de 8 adolescents soudé par l’habitude, une petite ville de province un peu ennuyante, le décor est planté et il nous semble bien familier. Raphaël a 16 ans et traîne parfois ses amis d’enfance comme un fardeau. Pourtant, il continue à rire à leurs blagues et à les soutenir quand il le faut. On ne se sépare pas de ses vieux potes si facilement…
L’effet de groupe, le regard des filles, les premières expériences. Ils vivent tous ces remous ensemble. Sur les réseaux sociaux, ils se lancent des défis. Souvent stupides, inoffensifs à l’occasion et quelques fois cruels. Le nombre de vues augmente, le regard de certaines change, le rythme s’accélère. Une spirale de violence sourde qui se fige brutalement quand le pire se produit.
Je ne pouvais pas le soutenir, ce regard. J’avalais ma salive, je regardais le bitume et je me sentais pareil à la merde de chien qui séchait sur le trottoir.
Moi non plus je n’ai rien oublié. C’est incrusté en moi, bien profond. J’y pense et y repense. Chaque jour et chaque nuit. Moi non plus j’ai rien oublié. Et aujourd’hui je le sais. Que je me trimbalerai ça toute ma vie.
D’habitude cantonnée à la littérature jeunesse, Claudine Desmarteau signe avec brio son premier roman. Avec une poésie urbaine et contemporaine, elle apporte une vision réaliste des relations qui se tissent à l’adolescence. Comme des frères parle de la fraternité comme une menace, un soutien faillible.
La prière aux oiseaux
La beauté et la poésie du Nigeria
La mort viendra, imprévue et soudaine, se percher sur le bord de son monde. Elle viendra sans préambule, sans bruit, sans interrompre les saisons, ni même peut-être le présent. Elle viendra sans altérer le goût de la prune sur la langue. Elle se glissera comme un serpent, inaperçue, guettant son heure. Un regard vers le mur ne révélera rien : ni lézarde, ni tâche, ni fissure par où elle aurait pu entrer. Rien de ce qu’il connait n’éveillera le soupçon : ni le pouls du monde au rythme inchangé, ni les oiseaux qui chantent sans modifier leur ton, ni le mouvement constant de l’aiguille des heures.
Récit hypnotique mené par le Chi de Chinonso (l’esprit protecteur de l’homme), La prière aux oiseaux envoûte par sa force poétique. Entre croyances ancestrales et modernité, cette histoire d’amour révèle aussi les travers des hommes, leurs faiblesses et leurs erreurs.
Obiama Chigozie est un auteur prometteur. Le finaliste du Booker Price 2019 s’était déjà imposé avec son premier roman Les pêcheurs, qui lui a valu une reconnaissance mondiale. La Prière aux oiseaux a la puissance shakespearienne de Roméo et Juliette, la force de Chimamanda Ngozi Adichie, et une poésie sans autre comparaison.
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