Le premier roman de Kathleen Glasgow est d’une authenticité déchirante et d’une honnêteté sans faille. Une histoire dont on ne peut se détourner. Une histoire qui a bouleversé des milliers de lecteurs et lectrices à travers le monde. Une histoire qui fait mal et pourtant, brille d’un feu extraordinaire.
Charlotte Davis est une fille en lambeaux. A dix-sept ans, elle a déjà perdu plus que la plupart des gens en une vie. Mais elle a appris à oublier. Le verre brisé avec lequel elle se coupe apaise sa peine jusqu’à ce qu’il ne reste que le calme. Le verre brisé murmure : Tu n’as plus besoin de penser à ton père et à la rivière. A ta meilleure amie, qui est partie pour toujours. Ou à ta mère, qui n’a plus rien à te donner. Chaque nouvelle cicatrice endurcit un peu plus le cœur de Charlie, pourtant cela fait toujours aussi mal. Si mal que ça n’a plus d’importance, et parfois cette douleur est nécessaire pour remonter la pente. Girl in pieces est le portrait profondément émouvant d’une adolescente dans un monde qui ne lui doit rien et lui a tant pris, et du chemin qu’elle entreprend pour se réparer.
Un roman qui sent le tabac froid et la sueur, la peur et la solitude. Un roman dont les pages n’ont rien de doux, non vraiment… Elles ont la texture du papier de verre, celui au très gros grain qui déchire le bois, le marque définitivement et vous force à terminer votre projet… Sinon l’essence sera gâchée, à jamais…
Girl in a pieces est une lecture sombre et douloureuse parce que Charlie vous ouvre son obscurité et que vous ne pouvez que la suivre. L’écriture est vive, comme les douleurs de Charlie. Incisive comme les mutilations qu’elle s’inflige. Chaque entaille renforce ses barrières émotionnelles, elles encouragent la douleur et pourtant elles permettent à Charlie d’avancer… Parce que s’il est indéniable que Charlie est en morceaux, l’espoir irradie littéralement de cette adolescente. Sauf qu’elle ne sait pas comment y croire. Qu’elle est terriblement seule, qu’elle n’a pas les armes, ni les outils… De page en page, on souffre avec elle, on apprend, on comprend. On n’adhère jamais, on hurle avec ou pour elle, on rêve de jeter loin, très loin, ce roman. Pourtant on reste, on accompagne Charlie et on met des mots sur les maux. De l’hôpital psychiatrique à sa « liberté » retrouvée, de son passé à son « avenir », la route de Charlie n’est qu’embûches et chutes et le chemin qu’elle continue d’arpenter sera long et tout autant chaotique. Cependant, elle avance, encore et encore. Elle prend si souvent les raccourcis qu’il ne faut pas, parce qu’elle ne sait pas. Parce qu’on ne lui a pas appris et parce que notre société laisse si souvent les malheureux sur le bord de la route. Alors on erre, on se perd, on trébuche et on souffre.
Girl in a pieces est un ascenseur émotionnel violent qui va vous briser le cœur et fendre vote âme. J’ai pleuré, j’ai eu la nausée et pourtant j’ai terminé ce roman. Parce qu’il libère une parole, il lève un tabou et jamais, au grand jamais, ne pose de jugement.
Contrairement à ce que laisse croire le marketing autour de ce roman, Girl in a pieces n’est pas un ouvrage pour les adolescents. C’est une lecture d’adulte, écrite par une adulte. Certes, il traite d’un sujet d’ado, de mal-être et de révolte, certes tous ces sujets sont au cœur de l’adolescence mais il n’est pas à mettre entre toutes les mains. Je ne dis pas qu’il est interdit aux adolescents, je dis juste qu’il faut être armé pour le lire, qu’il faut pouvoir assimiler et surtout, digérer cette lecture parce qu’elle peut aviver des douleurs, qu’elles peut créer des failles. S’il y a une leçon à tirer de Girl in a pieces c’est: soyons tendre avec nous même…
Notre rôle d’adulte est prioritairement cela; être tendre avec les adultes de demain. Alors faites vous confiance, parents, accompagnez-les et si vous estimez que vos enfants sont en mesure de plonger dans ce roman, ensuite, parlez-en.
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