Ellis Island en quelques mots
Tout le monde connaît la statue de la liberté. Située sur l’île d’Ellis Island, elle ne se trouve qu’a quelques km du continent américain. Géographie idéale pour accueillir les bateaux venus des quatre coins du monde. Aujourd’hui, c’est un lieu touristique, hier c’était la dernière étape avant de fouler un nouveau pays, de construire une nouvelle vie pour 14 millions de personnes. L’Amérique comme terre d’accueil, c’est le joli rêves de tous ces gens qui fuient leur pays d’origine. Mais les premiers arrivés sont les premiers servis. Les conditions d’entrée sur le sol américain se durcissent et les prix ne cessent d’augmenter. De nouveaux visages, pourquoi pas, mais des corps en pleine santé, des têtes bien faites et des porte-feuilles bien remplis.
Ellis Island en quelques dates
1892 : Ouverture du centre fédéral d’immigration
1917 : mise en place d’un test d’alphabétisation. Les migrants doivent savoir lire et écrire dans leur langue maternelle.
1924 : loi sur les quotas d’immigration
1929 : Ellis Island devient un centre de détention pour les personnes expulsées (dissidents politiques, anarchistes ou chômeurs)
1950 : Les communistes ne peuvent plus s’installer en Amérique
1954 : Fermeture d’Ellis Island
Ellis Island de Georges Perec
Une introduction à l’île
Ce livre se lit comme une présentation. Georges Perec relate des faits. En 1978, l’institut audiovisuel lui demande de faire équipe avec Robert Bober pour réaliser un reportage sur la célèbre île d’Ellis Island. D’abord simple lieu de passage, elle devient vite étouffante pour les immigrés qui se voient scrutés et jugés après des semaines de traversée éprouvante.
Terre de personne donc Terre de tous, l’Amérique n’honore pas toujours ses promesses d’avenir meilleur et n’autorise pas tout le monde à fouler son sol. Construire une culture commune en effaçant ses particularités c’est le mantra de ce pays tout neuf.
Perec nous montre bien cette évolution, ce durcissement dans les droits d’entrée en utilisant des chiffres concrets, des lieux existants. Les mots sont justes, les données exactes. Ce livre n’est pas un roman mais un travail journalistique.
Même s’il ne raconte aucun destin, les mots de Perec nous plongent dans l’attente, l’espoir et la peur.
Pour les plus curieux, le film documentaire se compose en deux parties. Le livre ne reprenant que le texte brut de Georges Perec sans les entretiens réalisés au cour de leur étude.
Le petit dernier de Jeanne Benameur
Ceux qui partent
Jeanne Benameur fera parti de la rentrée littéraire avec son livre Ceux qui partent qui sortira le 21 août.
L’histoire ? Un père et sa fille qui décident de tout quitter pour vivre une vie meilleure en Amérique. Donato et Emilia laisseront derrière eux le deuil, le chagrin et le soleil de l’Italie. Ayant survécus à la longue traversée en bateau, ils attendent leur nouveau départ parqués avec d’autres sur Ellis Island. Au loin les grattes ciel et l’espoir, derrière eux une once de regret.
Sous la chaleur oppressante de l’île, ils croisent de nombreux destins. Notamment ceux d’Esther et Gabor au passé si différents mais dont les émotions sont si proches dans ce huis clos infernal. Tous ont cet espoir de repartir à 0.
Alors dans cette dernière attente, on cherche à tromper l’ennui et l’angoisse. Si Donato tient fermement son livre dont il déclame des passages en Italien, d’autres font frémir leurs violons, leurs pinceaux, leurs corps. Toute cette vie emprisonnée dans l’objectif d’un jeune photographe.
Douceur, amour, cruauté et révolte, Jeanne Benameur frappe toujours juste et son petit dernier ne fait pas exception.
Elle vivait au dessus de son âge, dans des contrées où régnaient la passion et la folie, l’extase et la mort. Et tant pis pour ceux qui pensaient que Donato faisait folie sur folie depuis la mort de sa pauvre Grazia. On disait qu’il faisait d’Emilia une fille que personne ne voudrait marier tant elle avait la tête pleine de chimères et dure avec ça !
Le dernier gardien d’Ellis Island
Gaëlle Josse retrace les derniers instants de l’île
Après avoir connu de nombreux visages, une foule patiente, débordante d’espoir, l’île est désormais déserte. Nous sommes le 3 novembre 1954 et John Mitchell, notre narrateur, se retrouve seul. Dans neuf jours, Ellis Island fermera définitivement ses portes. Drôle de moment pour commencer un journal. Mais le temps a manqué au directeur du centre,le dernier gardien d’Ellis Island.
A travers la plume tendre et lyrique de Gaëlle Josse, toute l’histoire du XXieme siècle se déroule sous nos yeux. Car notre narrateur dit tout. Ses souvenirs, ses déboires, son amour pour Liz, son épouse. Entre son professionnalisme et son humanisme, John Mitchell est pris au piège quand il croise le regard de Nella. Cette immigrante italienne qui va tout chambouler. Jusqu’à quel point doit on suivre les règles quand elles nous semblent discutables, jusqu’où l’homme est il capable d’aller sous l’emprise du pouvoir ? Ce roman tragique et émouvant pose les questions de l’exil, de l’errance et de l’identité.
Pendant quarante-cinq années – j’ai eu le temps de les compter -, j’ai vu passer ces hommes, ces femmes, ces enfants, dignes et égarés dans leurs vêtements les plus convenables, dans leur sueur, leur fatigue, leurs regards perdus, essayant de comprendre une langue dont ils ne savaient pas un mot, avec leurs rêves posés là au milieu de leurs bagages. Des malles, des cantines, des paniers, des valises, des sacs, des tapis, des couvertures, et à l’intérieur tout ce qui reste d’une vie d’avant, celle qu’ils ont quitté, et qu’ils doivent, pour ne pas l’oublier, garder dans un lieu fermé au plus profond de leur cœur afin de ne pas céder au déchirement des séparations, à la douleur de se souvenir des visages qu’ils ne reverront jamais.
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