Ella Maillart a été l’une des voyageuses les plus audacieuses de la première moitié du XXe siècle et reste, pour moi, une source intarissable de rêve, d’inspiration et d’admiration. Née en Suisse en 1903 sur les bords du lac Léman, elle n’aura de cesse de parcourir le monde mais en 1946, elle revient en terres helvètes et s’établit à Chandolin, petit village perché à 2000 mètres dans le Val d’Annivers, où elle passe désormais six mois de l’année « de la dernière à la première neige. »
Ella Maillart fut une Femme des premières fois. A 16 ans, elle fonde le Champel Hockey Club, premier club féminin de Hockey sur terre de Suisse romande. En 1924, elle porte les couleurs de la Suisse aux régates olympiques, seule femme et la plus jeune participante de la compétition. De 1931 à 1934 elle concourt aux quatre premiers championnats du monde de ski alpin au sein de l’équipe suisse. C’est à cette époque qu’elle entame son premier grand voyage : Moscou. Elle en tirera un reportage et son premier livre : Parmi la jeunesse russe
Dès lors, le monde deviendra sa maison. Traversée de l’Atlantique en solitaire, Le Caucase, le Mandchoukuo petit état japonais en pleine Chine, Inde, Afghanistan, Iran ou encore la Turquie. Ella Maillart passera sa vie en nomade, curieuse des peuples, des montagnes, des plaines infinies qu’offre notre planète. Elle écrit, ses voyages, ses rencontres, ses découvertes tant géographiques qu’humaines et tous ses ouvrages sont des bijoux d’évasion et d’émotions.
Chandolin devient son port d’attache, le point de chute entre toutes ses expéditions. Elle y construit un chalet et quand elle ne profite pas en solitaire des neiges valaisannes, elle sert de guide culturel à des voyageurs curieux de découvrir les pays d’Asie.
Chandolin vous accueille à l’Espace Ella Maillart, exposition permanente pour découvrir cette vie passionnante.
« J’ai passé les six mois d’été à 2000 mètres d’altitude dans un village valaisan, inondé de soleil et de silence, au sommet d’une épaule de montagne encadrée de mélèzes. L’horizon vaste et varié est une source de joies toujours renouvelées. C’était le bonheur: pour la première fois, une maison était vraiment sienne. Mais l’aventure est la plus forte. »
Les Éditions Zoe publient un nouvel ouvrage d’Ella Maillart Regards sur Chandolin
Les photographies rassemblées ici témoignent du regard émerveillé que l’exploratrice a posé au fil des décennies sur le village et ses habitants, sa vie religieuse et communautaire menacée par l’arrivée de la modernité. À travers des textes qui accompagnent ces images vibrantes, Ella Maillart raconte la construction de la route qui dès 1959 relie Chandolin à la vallée, déplore l’invasion des touristes, péril pour l’équilibre alpin, magnifie la montagne, sublime et dangereuse.
Deux grands Monsieur post et préfacent ce recueil, Pierre-François Mettan et Jérôme Miezoz : l’un contextualise l’installation et la vie d’Ella à Chandolin, le second nuance le regard nostalgique de la photographe en révélant son arrière-plan: l’existence rude, le dénuement extrême de ces paysans montagnards.
Vous y trouverez aussi Ella Maillart ou la vie immédiate, texte hommage de Nicolas Bouvier à cette grande dame.
Comme Noël approche doucement, les Éditions Zoe proposent un deuxième ouvrage, en poche : Cette réalité que j’ai pourchassée
Les lettres qu’Ella Maillart a échangées avec ses parents déroulent le récit de ses années de grands voyages, de 1925 à 1941. Écrites sur le vif, elles saisissent ses humeurs du moment, annoncent les projets d’itinéraires, esquissent des réflexions sur l’Orient et l’Europe. Elles sont ici accompagnées de photographies et complétées par des reportages écrits pour divers journaux et magazines. Voile sur le Léman, fouilles en Crète, entraînement sportif et pérégrinations dans les montagnes d’URSS, sans oublier le récit classé « confidentiel » d’une visite à Winston Churchill en 1936 : une plongée dans la trépidante existence de la voyageuse.
Je ne peux que vous inviter à lire tous les ouvrages de l’aventurière mais je vous en sélectionne deux en primeur. Deux ouvrages qui m’ont tour à tour bouleversée et émerveillée.
La Voie cruelle. Deux femmes, une Ford, vers l’Afghanistan
En juin 1939, Ella Maillart et son amie Christina (Annemarie Schwarzenbach) décident de partir au volant d’une Ford vers l’Afghanistan, pour découvrir « comment on peut vivre en accord avec son coeur ». Dans ces paysages somptueux, tout oppose les deux femmes, l’une robuste, l’autre blessée. Ella n’arrachera pas Christina à la souffrance et à la drogue, mais elle tirera de cette expérience un récit magnifique et poignant
Avec Croisières et caravanes, paru en 1951, c’est à travers un demi-siècle d’existence qu’Ella Maillart nous promène, depuis sa jeunesse insouciante et rebelle en Suisse jusqu’à son long séjour en Inde qui la transforma si profondément. Pour la première fois, elle raconte sa vie, l’audace du parcours d’une femme seule, ce qui la fit courir ainsi vers « l’inconnu lointain ».
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