Des pages à l’écran
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En 1990 Neil Gaiman et Terry Pratchett écrivent un roman à quatre mains. Pour les fans d’un genre, c’est comme si la mode découvrait une collaboration entre Chanel et Balenciaga ou si Frédy Girardet et Pierre Gagnaire investissaient ta cuisine ! Ce roman à quatre mains c’est Good Omens ou De bons présages.
Petit bijou de la littérature Fantasy, Good Omens se veut une parodie de Omens, le livre de la malédiction de David Seltzer (oui oui, Damien, le fils du diable tout ça).
Terry Pratchett… Comment vous parler de Terry Pratchett ?
Il écrit son premier roman en 1971 et il décède en 2015. 44 années à écrire…
Il écrit principalement de la Science-Fiction et de la Fantasy même si on peut tomber sur un ouvrage dédié aux chats en parcourant son œuvre. Son premier roman est un livre pour enfants et suivra une bonne dizaine..
L’univers pour lequel il est le plus connu reste Les Annales du Disques Monde, qui comporte à lui seul 41 livres, sans compter la vingtaine d’ouvrages qui tournent autour du Disque Monde.
En plus de tout cela, Terry écrit d’autres romans, seul ou en collaboration.
Voilà, je ne vous ai toujours pas parlé de Terry Pratchett, j’ai juste listé son œuvre et je sens déjà que vous avez le tournis. Terry Pratchett fait de la Fantasy comme on n’en fait pas. J’ai essayé de le comparer à plein d’auteurs afin de créer un intérêt chez mes amis. Tolkien pour l’étendue de ses ouvrages et la complexité du monde qu’il a créé, Douglas Adams pour l’humour et l’absurdité, Roald Dahl pour l’impertinence et le double sens de ses livres. Mais je ne suis jamais convaincue quand je tiens cette théorie. Parce que finalement, Terry Pratchett reste unique en son genre et qu’il faut vivre dangereusement dans la vie, alors plongez-vous dans son univers !
Neil Gaiman… Est-ce que j’ai besoin de vous parler de Neil ? Sandman, Stardust, American Gods, Coraline etc. etc. etc. La liste des prix reçus pour ses créations doit prendre autant de place sur un mur que les prix eux-mêmes…
S’il y a bien quelque chose que les deux auteurs partagent, c’est une imagination débordante. Ajouter à cela leur créativité unique et fouillée, leur culture si vaste qu’on peut y ranger trois fois la Grande Bretagne, sans oublier un talent d’écriture indiscutable, vous obtenez une totale réussite !
La rencontre littéraire de Pratchett et Gaiman est une réussite totale, on se demande même pourquoi ils n’ont pas retenté l’exercice.
Je laisse la parole à Terry qui nous raconte comment ils l’ont mené.
« J’étais le Gardien de la Copie Maître, je peux dire que j’ai écrit un peu plus des deux tiers de De bons présages. Cependant, nous nous téléphonions au moins une fois par jour. Si vous avez une idée pendant une séance de brainstorming avec quelqu’un d’autre, de qui est ce l’idée ? L’un de nous va écrire 2000 mots après trente minutes au téléphone, qu’est ce qui se passe exactement ? J’ai écrit davantage parce que :
1. Je le devais. Neil devait continuer Sandman – Je pouvais laisser le Disque Monde de côté.
2. Un de nous deux devait être l’éditeur général, pour faire toutes les coutures, les coupures, et pour remplir les trous. Comme je l’ai déjà dit, nous étions d’accord que c’était mon rôle. Si ça avait été une bande dessinée, ç’aurait été le rôle de Neil, pour les mêmes raisons que c’était le mien pour un roman.
3. Je suis un salaud égoïste et j’essayais d’écrire en avance pour avoir les bons morceaux avant Neil.
Au début, j’ai fait plus d’Adam et les Eux, et Neil la plus grande partie des quatre cavaliers, et tout le reste par qui que ce soit. Vers la fin, de grosses portions étaient écrites par une créature composite appelée Terryetneil, qu’importe quelle personne tapait au clavier. Après un accord, je peux dire qu’Agnès Barge, sa vie et sa mort, était complètement et totalement mienne. Et Neil assume fièrement la responsabilité des asticots. Neil avait une grande influence sur les premiers chapitres et moi sur les derniers. Finalement, c’est un livre fait par deux gars, qui se sont partagé l’argent équitablement, pour s’amuser, et qui ne le referaient jamais pour rien au monde »
Du roman à la série télévisée
Terry et Neil voulaient tous deux porter leur roman à l’écran. Ils ont même demandé à Terry Giliam des Monty Python de concrétiser cette envie. Mais ce projet n’a jamais vu le jour et Pratchett est décédé en 2015. Pratchett a fait promettre deux choses sur son lit de mort : que son agent littéraire passe au rouleau compresseur toutes ses notes et œuvres non publiées et à Gaiman de terminer l’adaptation de Good Omens !
C’est donc un des deux auteurs du livre, adoubé par l’autre, qui va prendre les commandes. Nous tenons peut-être là la recette d’une bonne adaptation ? Surtout quand cet auteur est Neil. Il a cette capacité dans l’écriture de scénariser ses récits. Tous ses livres sont très « cinématographiques ». Comment l’auteur de son propre livre pourrait trahir son œuvre? Qui de plus légitime que Neil Gaiman pour tenir les rênes et de plus, avec l’envie sincère de rendre hommage à son ami Terry ?
À cette recette de base, vous ajoutez des acteurs géniaux :
Le démon Rampa est interprété par David Tennant qui est « juste » le dixième Docteur de Docteur Who ou encore Barry Croupton Junior dans Harry Potter. Aziraphal nous dévoile un Michaël Sheen exceptionnel. Vous avez pu le rencontrer dans Underworld, il jouait Lucian, ou encore en Tony Blair dans The Queen. Le duo d’acteur est aussi réussi que celui du livre. Ils incarnent l’ambiguïté à merveille et l’on sent bien les 6 mille années d’amitié qu’ils trimbalent avec eux. Les deux acteurs s’amusent franchement et leur plaisir se ressent !
Vous ajoutez une pincée de Jon Hamm, Frances McDormand, Michaël McKean, Miranda Richardson ou encore Adria Arjona. La bande de gosses est tenue par quatre jeunes acteurs plus que prometteurs et je souhaite à leur carrière d’être illuminée après cette série.
Dernier ingrédient d’une réussite ? La volonté de l’adapter en six épisodes, pas un de plus, pas de suite prévue, ni de spin-off, ni de préquel. On reste cohérents, honnête et juste avec l’œuvre d’origine.
Il manque encore une épice à cette cuisine : on se fait plaisir. Gaiman et son équipe se sont vraiment, vraiment, vraiment fait plaisir ! Des clins d’oeil à tant d’univers, des caméos et apparitions hilarants. Tout est maîtrisé et s’il me reste un mot pour décrire la série Good Omens, je choisirai Ineffable !
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