Un premier roman, c’est toujours compliqué.
Lorsque certains auteurs parlent d’un véritable accouchement, ils ne sont peut-être pas loin de la vérité. On écrit, réécrit, noirci de la page, tente des trucs, se vautre même parfois…
Un premier roman c’est aussi le moment de poser son style, sa patte, le moment de montrer au monde ce que l’on vaut et que l’on vaut la peine d’être lu.
Un premier roman, c’est extrêmement difficile.
Et il paraît que le deuxième, c’est pire.
Bon, heureusement, pour certains écrivains, un premier roman est l’occasion de tranquillement et calmement déposer une bombe à retardement stylistique dans le milieu littéraire.
C’est le cas de Valentine Imhof qui, après une biographie sur Henry Miller, débarque dans milieu du roman noir à grand renfort de poésie, d’alcool complexe, de rock et de Doc Martens.
Cette nana est très certainement givrée, elle doit faire tout un tas de trucs dingues au lit. Et pour le savoir, il faut accélérer la partie.
Alors, à coups de mensonges éhontés, ils se retrouvent vite à poil, sur les draps, en pleins préliminaires. Coups de langues voraces, baisers explorateurs, caresses rapaces, malaxages avides. Tout semble plutôt bien engagé, quand le mec s’interrompt, net, soudain inquiet…
Alex court.
Elle fuit, mais quoi ?
Son passé, ses attaches, le monde.
Seul les innombrables tatouages parcourant entièrement son corps, le revêtant d’un voile d’extraits de poésie presque indéchiffrable, la rattache à ce qu’elle est et ce qu’elle veut.
Car Alex en a marre de fuir, elle va se venger…
Le style est d’une clarté et d’une rudesse extrême. On est emporté dès le début dans ce maelström de mots durs et sublimés par cette poésie qui tient l’ensemble comme un squelette invisible.
Via les multiples références au rock, les nombreuses étapes traversées par l’héroïne sont aussi prétextes à nous emmener sur les traces de la musique et ceux qui la racontent le mieux.
L’angle d’attaque de la classique traque est ici revisité de manière intelligente et on se surprend à regarder, bras ballants, le spectacle qui se déroule sous nos yeux, comme une voiture sans frein qui passerait devant nous en direction du mur.
Inspirée par la mythologie nordique, symbole de Loki tatoué sur la nuque, Alex est un personnage qui restera longtemps dans les mémoires des amateurs de romans noirs et qui entre immédiatement au panthéon des héros de la littérature moderne.
Extrait : Nouveau malaise. Elle ferme les yeux et voudrait s’allonger là, sur le bitume. Elle pense à la boue chaude du marais qu’elle aimerait ne jamais avoir quittée. Elle voudrait pouvoir s’y lover, s’y blottir, s’y enfoncer. Pour ne plus rien ressentir et pouvoir tout oublier. Disparaître, une bonne fois pour toutes. Que la traque s’arrête.
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