Les semaines se suivent et se ressemblent. Le mois de mars est certainement un des meilleurs mois de l’année au niveau des sorties musicales, pour peu que l’on écoute autre chose que des chants bretons remis au goût du jour ou des compiles fourre-tout qui synthétisent le manque d’engagement des maisons de disques. Et pourtant, la révolution n’aura pas lieu. En même temps, ce n’est pas ce que l’on demandait à ces ex cinq garçons plein d’avenir. Si les Strokes, phénomène du début des années 2000, avaient continué sur leur lancé de deux albums par année, on se serait lassé aussi vite qu’on la fait sur des groupes comme Starsailor ou Keane passés maître dans l’art de se brûler les ailes. Officiellement en pause studio depuis 2005, officieusement à deux doigts de se bouffer le nez suite à la vente de millions de disques et l’accumulation de billets verts, les Strokes avaient besoin de se séparer quelques temps et de se frotter à d’autres expériences. Ainsi, après avoir excité la censure sur « Is this it » (2001) et sa pochette sulfureuse, conquis les charts internationaux sur « Room on fire » (2003) et assis leur réputation sarcastique avec « First impressions of earth » (2005), nos gosses de riche préférés ont pris des risques sans trop en prendre. Sachant que leurs fans allaient suivre, Julian Casablancas, Albert Hammond Jr et Nikolai Fraiture ont tenté l’aventure solo, repoussant à chaque fois la date d’une reformation devenue presque hypothétique. C’est en Janvier 2010 que le batteur Fabrizio Moretti avait vendu la mèche, après des séances studios prometteuses. Un an et quelques péripéties plus tard, « Angles » vient garnir une discographie qui habilla la décennie de jeans moule-burne et de Converse aux pieds.
Revenus à la recette initiale d’une dizaine de chansons simples mais efficaces, l’album nous plonge légèrement plus que les précédents dans l’univers de la new-wave catchy, mais ici appuyée par des riffs toujours aussi nerveux. Soucieux de faire passer cette ébauche comme un mélange de toutes leurs idées (et pas seulement celles de Casablancas), les Strokes montrent quand même une étendue artistique plus large et qui laisse place à ce que chacun d’entre eux sait faire de mieux. Alors quand « Machu Picchu » et « Two kind of happiness » mettent en avant les qualités vocales surprenantes du chanteur, « Under cover of darkness » et « Taken for a fool » nous présentent un Fabrizio Moretti qui emploie sa batterie comme une mitrailleuse lourde. « You’re so right », surprenant et incisif, sonne comme le bébé psychédélique du soliste Albert Hammond Jr, « Games » prend sa source dans les 80’s de Suicide ou Kraftwerk sans perdre une miette de ces géniales influences, « Metabolism » sent un peu trop le Muse pompeux avant que « Life is simple in the moonlight » clôture en beauté et rattrape cette fausse note qui aurait pu gâcher à tout jamais la fin d’un album frais et rassurant. Nerveux sans être tranchants, pas surprenants mais revitalisés, les Strokes font du Strokes, le juste prix après six ans d’absence. En gros, les mecs n’avaient plus trop le droit de se planter. Fan de rock qui tâche, passe ton chemin, les Strokes font revivre un certain côté de la new-wave et restent, au même titre que les Kings of Leon, un groupe facile à détester mais qui remplit des stades. A bon entendeur…
Disponible en version CD et LP: The Strokes, « Angles »
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