2011 vient à peine de commencer, le printemps pointe le bout de son nez, et on tient peut-être déjà le disque de l’année. Et comme souvent, ce sont de vieux briscards du rock qui sont à l’origine de cette excellente galette. Apparus au début des années 80 sur la scène indépendante américaine, R.E.M. est rapidement devenu le groupe favori des étudiants yankee. La formation originaire d’Athens va d’abord s’imposer en mêlant l’énergie violente du punk-rock (et la poigne des Troggs) aux harmonies mélancoliques du folk (les Byrds en tête). A force d’albums inoubliables (« Murmur », « Automatic for the people », « Fables of reconstruction »), R.E.M. a conquis le monde et a pris une ampleur universelle, devenant même le groupe culte d’un certain Kurt Cobain, inspiré du début à la fin par l’intensité et la puissance de suggestion du leader Michael Stipe. Il est vrai qu’à force de matraquages radiophoniques, on a tous plus ou moins été gavés comme des oies par « Loosing my religion », et notre foi n’a pas doublé de volume pour autant. A un certain moment, on a même craint le catalogage et le coup de mou des « papy du rock qui ont fait un truc bien il y a vingt ans ». Mais R.E.M. n’ont jamais été aussi bon que quand ils font ce qu’on leur demande: une musique empreinte de gravité et de mystère, oscillant entre calme et violence.
Exit le précédent opus « Accelerate » (2008), certes punchy et mélodique mais rendu balourd par un côté politique exacerbé; bienvenue à « Collapse into now », qui sonne intemporel et se juxtapose parfaitement à « Out of time » paru en 1991 et qui représente à ce jour la meilleure vente du groupe (20 millions). Vous l’aurez compris, l’album, enregistré aux studios Hansa à Berlin flirte avec le bon vieux temps du « greatest indie band in the world ». Malgré un refus provisoire du groupe à présenter leur dernier né sur les scènes mondiales, il suffit juste de fermer les yeux et on s’imagine chahuté dans la foule sur « Discoverer », ouverture scandée et héroïque, symbole du potentiel musical inusable d’R.E.M. « All the best » a tout de l’hymne vénérable, prêt à faire péter les derniers néons du monde et « Uberlin » appelle les fidèles nostalgiques dans un bain de jouvence éternelle, en mettant l’accent sur le raffinement d’un groupe devenu l’un des rares classiques de notre temps. « Oh my heart », choisi comme single promotionnel, montre un Michael Stipe sensible et concerné, en phase avec ses convictions et son engagement, et retrace le triste épisode de l’ouragan Katrina que la formation semble s’être pris en pleine poire si l’on se fit à l’ambiance déchirante et douloureuse de ses 3 minutes 20. Jonglant entre émotion et lyrisme (« It happened today », Every day is yours to win »), fermeté et dynanisme (« Alligator_Aviator_Autopilot_Antimatter », « Mine smells like honey »), R.E.M. fait la part belle à ses invités (Peaches, Eddie Vedder ou Patti Smith) qui ne savent plus ou ranger leur serviette tellement la vaisselle a volé en éclats. Quel plaisir de voir les vieux pots nous faire régurgiter la soupe actuelle! A ceux qui y voient une redondance barbante et nullement enthousiasmante, « Collapse into now » leur renverra une identité retrouvée et une pêche ressuscitée. R.E.M. a gagné sa place dans les étoiles et ne montre aucune faiblesse. Clairement, les anti-héros de l’indie ont la cinquantaine inspirée et turbulente.
Extraits à écouter ici: Discoverer – All The Best – Every Day Is Yours To Win
Disponible dans toutes les Fnac: R.E.M. « Collapse into now »
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