Le statut de « Smile » est certainement celui du disque pop dont la publication (officielle) aura été la plus attendue dans toute l’histoire du rock de ces quarante dernières années.
UN PEU D’HISTOIRE, DONC…
Fin 1966, les Beach Boys publient l’album « Pet Sounds », un disque de pop qui a ceci de révolutionnaire qu’il délaisse les arrangements basse/guitare/batterie au profit de divers instruments issus de la musique classique mais aussi en intégrant bruitages et percussions bricolées (gobelet).
Pendant ce temps les Beatles sortent « Revolver », Paul McCartney déclarant à qui veut l’entendre que la chanson « God Only Knows » est une des plus belles qu’il n’ait jamais entendue.
Encore plus fou, le morceau « Good Vibrations », collage de plusieurs séquences musicales, sorte de mini-symphonie, construit pendant près de trois mois (hé! ouais, pas de samplers à l’époque!), donne l’indication de la direction à venir des créations de Brian Wilson, l’âme du groupe.
Brian continue avec son parolier Van Dyke Parks et se lance sur le projet « Smile », sa » symphonie adolescente » comme il l’appelle.
Le même McCartney en visite à Los Angles participe aux choeurs de « Vegetables » et fait écouter des morceaux du futur concept album des Beatles. Cette saine compétition stimule Brian, malheureusement les drogues et la pression de même que sa méthode de travail longue et laborieuse le mettent en retard, le groupe peu convaincu par cette nouvelle direction musicale suit le mouvement en trainant les pieds.
Le coup de grâce viendra avec la parution du « Sergent Pepper’s Lonely Hearts Club Band » des Beatles, Brian s’avoue vaincu et range « Smile » dans un tiroir. Il tombe dans une sérieuse dépression, le décès de son père s’ajoutant à son échec personnel (il reste pendant 3 ans au lit).
Des éléments de l’album apparaîtront par la suite disséminés sur « Smiley Smile » (le remplaçant de « Smile ») ou « Surf’s Up », sur l’album du même titre.
Pendant des années les fans zélés essaieront de reconstituer l’album dans sa forme première, pas mal de pirates circulant sous le manteau d’ailleurs, voire des coffrets regroupant les sessions d’enregistrement dans leur intégralité.
UN PREMIER PAS VERS « SMILE »:
On croyait l’album perdu à jamais, mais c’était sans compter avec la persévérance des fans et musiciens du groupe Wondermints qui courant 2004 réussissent à convaincre Brian Wilson de ressusciter le projet « Smile » pour le présenter sur scène.
Un long processus cathartique commence, par la magie de l’oeuvre les répétitions avancent et finalement la pièce est jouée à Londres, c’est la consécration. Cerise sur le gâteau, Sir Paul McCartney, très ému vient féliciter Brian backstage.
Une tournée à guichets fermes s’ensuit.
Le dvd de « Smile » est émouvant dans la mesure on l’on voit le visage de Brian Wilson, littéralement rajeunir d’au moins dix ans.
Pour Brian, c’est une blessure qui est enfin renfermée, une erreur réparée, dès lors plus rien ne peut s’opposer à la parution du disque original, les fans piaffent d’impatience.
« SMILE », ENFIN:
Le disque vient de paraître et les choses ont été faites dans les règles de l’art:
-Double cd avec l’album plus les meilleurs extraits des séances.
-Le coffret collector avec les 5 cd + 2 lp, deux 45t et un livre illustré.
Nous allons nous concentrer sur le double cd.
Tout d’abord on est frappé par la pureté du son (sans doute trop habitués aux pirates), même les morceaux publiés auparavant apparaissent dans des versions sensiblement différentes.
Cette symphonie adolescente, est d’une rare cohérence. Les éléments (le feu, les âges de la vie sont traités « Child is Father of the Man ».
Le caractère très cinématique de la musique évoque la b.o. d’un film hollywoodien épique et grandiose.
Ca démarre avec un morceau à cappella, « Our Prayer », renversant de beauté.
Puis c’est le far-west avec « Heroes and Vilains » dans sa version complète et cela se termine avec la mélancolie à la Chopin de « Surf’s Up ».
On ne saura jamais comment « Smile » aurait pu changer le cours de l’histoire de la musique populaire. Arrêtons de nous perdre en conjonctures et sachons apprécier ce disque à sa juste valeur…intemporelle.
Laisser un commentaire