Petit flashback au début des 90’s: période Grunge, (mycose des pieds en français, précision importante pour situer la propreté du mouvement). On a tous vomi nos frites et nos bières sur une ambiance de fond Smashing Pumpkins, auteurs d’albums marquants et symboles d’une génération mélancolique (« Siamese Dream », « Mellon collie & the infinite sadness », « Pisces iscariot »…). Icône encore vivante de l’épopée fulgurante d’une ère monopolisée par Nirvana, les cheveux gras et les chemises à carreaux, les « citrouilles éclatées » ne sont jamais vraiment mortes, artistiquement parlant. Leur force? Un leader, Billy Corgan, toujours resté maître (conciliant) à bord malgré les drogues, les tentatives de suicide, les déchirements internes et la rédemption religieuse (depuis 2005) surprenante mais apparemment salvatrice. William Patrick Corgan Jr, qu’on nommera Billy éternellement, surnom toujours plus fun à 40 berges, avait compris la chute industrielle du disque à l’aube des années 2000, donc bien avant « Ugly Thom » (Yorke, de Radiohead) et son coup marketing de 2007 pour l’album « In rainbows ».
En 2000, prenant une tournure electro-rock (exit la section rythmique et son batteur Jimmy Chamberlain parti causer de ses addictions autour d’un feu de scouts thérapeutiques), les Smashing publiaient deux albums étonnants, « Machina, machine of god I et II », soit en disque payant, soit, grande première, gratuit sur un internet pré-pubère et pas encore prêt à avaler la crise du disque. Semi-échec. Pas grave estime Corgan, l’avant-gardisme a de toute façon sa place, au moins dans les livres d’histoire. Après ça, il est quand même difficile de se relever, surtout que le Grunge, tout modernisé qu’il soit, ne semble plus trop avoir sa place aux States et ailleurs, où l’on préfère envahir les stades pour y perdre ses capacités auditives aux sons destructeurs des gros amplis de Linkin Park ou Nickelback… Corgan va se marginaliser et le groupe avec, tentant des projets solos ratés et autres formation hara-kiri à oublier mais soyons clairs, assez incompris par la critique.
Un mythe ne s’efface pas, encore moins quand on sait la tonne de gazon qu’il lui reste sous le pied. Peut-être aidé par la pression de ses fans, Corgan va reprendre le contrôle de sa vie. En 2007, accompagné de musiciens contractuels, il va enregistrer un album incroyablement puissant intitulé « Zeitgeist », qui mettait en avant les aspects les plus métalliques et les plus brutaux du son des Pumpkins. S’en suivit une tournée quasi sold-out un peu partout dans le monde: la magie de la scène ne ment pas. Malgré cette renaissance, Chamberlain, décidément trop destructeur, fût viré une bonne fois pour toutes par Corgan, excédé et bien décidé à garder un cap salutaire. Un an après, un dernier EP 4 titres très réussi, « American gothic », à l’allure folk-rock nouvelle, mis une parenthèse silencieuse et suspicieuse à l’avenir du groupe. Ce n’est que 3 ans plus tard que Corgan, qui incarne plus que jamais à lui tout seul l’âme des Smashing Pumpkins, annonce un projet fou et ambitieux mais que les vrais fans suivront à coup sûr: onze disques de 4 titres qui constituent un répertoire de 44 nouvelles chansons. Le tout présenté dans des coffrets classes et qui « valent » leur prix, loin d’un boitier plastok moche qui finit en général cassé ou rayé. Le contre-pied idéal, n’importe quel accro étant prêt à payer un produit joli, exalté, un mélange d’objets artistiques (visuels incroyablement beaux+CD+Vinyl) qui laisse une trace tangible au contraire d’un téléchargement illégale et insipide qui s’efface aussi facilement que les neurones apathiques d’un Geek.
Un premier coffret publié en Mai 2010, « Teargarden by kaleidyscope vol.1 », regroupait 4 chansons préalablement distribuées gratuitement sur leur site, toutes plus inspirées et d’une infinie tristesse made in Corgan. « A song for a son », ballade noisy élancée aux solos qui rapprochent son auteur des sphères hendrixiennes, fût même en tête du hit-parade ricain. Chapeau. Comme sur « A stitch in time », ce processus est un nouveau point de départ pour le bébé musical de Billy, ne voulant pas réitérer le comportement indélébile de sa mère devenue folle et qui l’abandonna à l’âge de 4 ans. Corgan maîtrise ses guitares comme personne et n’a cessé de s’améliorer au fil des ans, feed-back positif des années galère. Nouveau visuel, ancré dans une sorte de psychédélisme graphique ressuscité à l’image de son auteur, la sortie de ce « Teargarden by Kaleidyscope vol.2 », suite logique et assurée, laisse présager de beaux jours au talent impassible de Corgan. Car son travail doit être placé là où il le mérite. On espère juste que les disquaires joueront le jeu, il suffit juste de perpétuer un mythe: les Smashing Pumpkins.
Extraits à écouter ici: The Smashing Pumpkins, « Song for a son » – The Smashing Pumpkins, « Widow wake my mind »
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