L’intégrale en noir et blanc
Stephan Colman
Steve Cuzor
Philippe Thirault
Editions Dargaud
« Je m’appelle Huck Finn. On est le 25 aout 1935. Je reviens aujourd’hui dans ma ville natale : Morgan City, dans l’état du Mississippi, pour enterrer mon ami Charley Williams. On a été inséparables, lui le nègre et moi le blanc, pendant quatre ans… Quatre longues années à parcourir clandestinement ce pays sur des dizaines de miles… Notre histoire avait démarré d’une manière plutôt bizarre : Charley m’avait assassiné en 1931 ! … »
Ainsi débute cette mémorable aventure ou l’on retrouve Huck, le personnage créé par Mark Twain, transposé dans l’Amérique de la Grande Dépression. Avec son grand frère Tom, les deux enfants vivent dans la crainte de leur père, l’ignoble Joe Finn, ivrogne magouilleur et violent. « Tape-Dur » est d’ailleurs le seul nom que lui donnent ses fils… Lorsqu’un acolyte de Joe se ramène avec sa fille, la jolie Suzy, le paternel ne se tient plus. Tom et Suzy s’échappe par le grand fleuve tandis que Huck est finalement placé chez un couple de la petite bourgeoisie de MorganCity, les Denis.
Mortimer Denis exploite dans sa ferme d’élevage des poissons-chats et quelques nègres. Si l’esclavage est aboli depuis plusieurs décennies la servitude perdure. Huck se rapproche de l’un d’entre eux, Charley, qui la nuit venue l’amène écouter de la musique dans des juke-joints (cabarets du pauvre). Mais un petit blanc chez les noirs ne passe pas inaperçu et Charley se fera virer de chez les Denis. Comme chez Mark Twain, les auteurs dénoncent à travers le regard candide de Huck l’hypocrisie de ceux qui prétendent l’éduquer. Le retour de Joe Finn amène Huck à inventer le subtil stratagème de son assassinat par son père… Malheureusement c’est Charley qui sera accusé et voilà nos deux compères sur la route traqués par le sheriff Bisner…
C’est l’Amérique de Twain, Steinbeck, Kerouac que l’on retrouve dans O’Boys. Huck et Charley se joignent aux Hobos, ces saisonniers qui vagabondent de ville en ville, le plus souvent en train, pour trouver du travail. Dessin et scénario se conjuguent à merveille pour donner moult détails sur le quotidien des pauvres gens qui tracent la route. Au fil des pages et des multiples péripéties l’amitié des deux héros se consolide et offre la plus belle des réponses aux esprits étriqués. En prenant en main leurs destins ils s’affranchissent d’une certaine aliénation sociale et de cette tristesse entêtante que l’on retrouve dans ce Blues que les auteurs utilisent comme fil rouge tout au long de l’histoire.
O’Boys a des allures d’épopée moderne : le Mississippi et ses légendes, l’Amérique profonde sillonnée de longues voies ferrées sans fin, des carrefours perdus au milieu de nulle part d’où surgissent d’improbables juke-joints, sont les décors d’une humanité errante qui brille de ces quelques étoiles échappées pour un destin hors du commun…
Bonne lecture !
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