Parmi la dizaine de titres qui viennent d’être réédités chez Urban Comics, à l’occasion de la sortie du film Man of Steel le 19 juin, je vous propose une petite sélection de trois récits complets de Superman (un par jour), parfaite introduction au vaste univers du plus grand des super-héros.
Et nous continuons aujourd’hui avec Superman : For tomorrow, traduit par Superman : Pour demain en français. Scénarisée par Brian Azzarello (100 Bullets, Joker, Hellblazer) et dessinée par Jim Lee (Batman Hush, All-Star Batman & Robin), cette minisérie datant de 2004-2005 retrace ce que Superman est prêt à faire pour sauvegarder l’avenir de l’espèce humaine.
Un million de personnes ont disparu de la Terre. Sans laisser la moindre trace. Superman mène alors son enquête et découvre rapidement qu’une étrange machine à la technologie non-humaine est à l’origine de ses disparitions. Mais qui est à l’origine de cette machine ? Superman veut le savoir, pour sauver les humains, oui, mais surtout pour retrouver Lois Lane, l’amour de sa vie, qui s’est aussi volatilisée. Venant se ressourcer auprès d’un prêtre, il réalisera bientôt qu’il a lui aussi une part de responsabilité dans ce phénomène. Mais comment, pourquoi ? Peut-être est-ce Metropia. Tiraillé, Superman va tout faire pour comprendre et rectifier le tir. Et sa quête de compréhension le mènera bien plus loin qu’il ne l’avait pensé, croisant Zod, Wonderwoman, Batman, Aquaman, etc.
Superman : For tomorrow est une réflexion passionnante sur les deux principales faiblesses de Superman. D’un côté, son attachement sans limites à Lois Lane et de l’autre, son désir parfois exagéré de sauver le monde, qui paradoxalement le mènera à commettre de graves erreurs. C’est donc dans un brouillard mental entier que nous trouvons Superman au début du récit. Dans une incompréhension totale, il tente désespérément de trouver une explication à quelque chose qui lui paraît insoluble. C’est la première fois que ça lui arrive et tout ses repères ont disparus, d’autant plus que Lois, l’épaule sur laquelle il peut parfois s’appuyer et tirer une partie de sa force de volonté, a aussi disparu. Au même titre que dans Superman Birthright (chroniqué ici), Superman nous est à nouveau présenté dans son aspect le plus humain, le plus égaré. Azzarello a alors l’intelligence d’introduire le personnage neutre (au début du moins) du prêtre, qui permet au super-héros de se livrer sans retenue sur ses doutes et ses hésitations, qui sont plus innombrables que jamais. Mais heureusement pour Superman, plusieurs événements étranges vont provoquer une prise de conscience essentielle. Car habité depuis ses débuts par le devoir de sauver l’espèce humaine, cette prérogative finit par l’aveugler, au point qu’il créa une planète parallèle afin de sauvegarder les innocents, au cas où la Terre venait à être détruire, comme sa planète d’origine Krypton. Ce traumatisme d’enfance est donc encore une fois bien présent dans cette intrigue, mais se retourne cette fois-ci contre Superman. La peur que tout recommence, qu’il perdre à nouveau ceux qu’il aime, l’a poussé à jouer à Dieu et a créer un endroit qui n’a pas lieu d’être et qui est ainsi promis à la destruction. En voulant faire le Bien, Superman a fait le Mal. C’est là le grand tour de force de Superman : For tomorrow et le génie de Brian Azzarello.
Génie qu’il partage avec Jim Lee, dessinateur culte, recordman du comic le plus vendu au monde (X-Men vol. 02 #01, vendu à 8 millions d’exemplaires), qui ici fait honneur à sa réputation. Ayant depuis plus de dix ans une liberté créative quasi-totale, il expérimente dans Superman : For tomorrow un style plus versé vers le croquis que vers le dessin hyper-léché auquel il nous avait habitués avec des œuvres comme Batman Hush. Et il réussit haut la main. Les effets d’ombre hachurés sont innombrables et donnent une épaisseur incontestable aux traits des personnages. Les scènes de combats sont toujours autant impressionnantes, avec des angles de vue dont lui seul a le secret. La puissance évocatrice de ses images reste donc intacte et donne une force encore plus appuyée au récit déjà intense.
Superman : For tomorrow nous montre donc un Superman faible et en proie à des doutes profonds. Le voir ainsi éveille en nous une empathie rare pour un super-héros d’habitude si inébranlable et on se laisse presque prendre à avoir pitié de lui. Azzarello et Lee signe un chef-d’œuvre d’écriture et de graphisme qui redéfinit à nouveau un personnage très (trop) établi.
Demain : All-Star Superman, de Morrison et Quitely.
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