Jack Kirby
Urban Comics
Collection DC Archives
« Il s’est produit quelque chose dans un passé flou… ! Une catastrophe naturelle en rapport avec des radiations ! Les habitants des bunkers ont rêvé, jusqu’à leur dernier souffle, du jour où ils reviendraient… Du jour où il n’y aurait plus de radiations… Et où ils retrouveraient le monde qu’ils avaient abandonné… Kamandi se rappelle ce que lui a raconté son grand-père sur l’Année des Grandes Secousses ! Est-ce à cette époque que New-York à péri ? Kamandi n’en a aucune idée… »
Ainsi débute l’histoire de ce jeune garçon sur la Terre AD (Après le Désastre). La statue de la Liberté qui baigne dans les flots, et rappelle au passage celle du film La Planète des Singes, symbolise la fin de la civilisation humaine. Kamandi a reçu de celui qu’il appelle Grand-père des bribes de connaissances de ce qu’était le monde d’avant notamment grâce à une bibliothèque de microfilms, mais dés le 1er épisode son protecteur est tué par une bande de loups pillards et Kamandi se retrouve seul sur cette Terre dévastée…
Des animaux anthropomorphes que Kirby caractérise schématiquement règnent sur la Terre : des loups cruels, des gorilles frustres, des léopards aristocrates, des tigres conquérants… L’espèce humaine a régressé au stade de la sauvagerie et dans ce monde inversé Kamandi apparait comme une exception, le dernier garçon sur la Terre doué d’intelligence et de raison… Une curiosité que ces hordes d’animaux veulent à tout prix capturer pour en faire un esclave de luxe ou un objet d’étude selon le degré de sociabilité de celle-ci. L’histoire de ce jeune garçon est donc celle d’une fuite perpétuelle et chaque épisode met en scène cette fragile liberté à sauvegarder à tout prix.
Le récit brasse de multiples influences : littérature d’aventures, fables, western, science-fiction… Un grand patchwork qui semble décousu de prime abord et qui acquiert une forme de logique interne après plusieurs péripéties. Chaque épisode est introduit par une grande illustration en double page qui annonce le fracas à venir ! Soulignons l’excellence de l’encrage de Mike Royer. Il faut toutefois reconnaître que Kirby reste avant tout un fantastique dessinateur, le récit fonctionne parfaitement sur sa narration visuelle, et Kamandi vaut surtout le détour pour cette verve graphique à nulle autre pareil.
Kirby organise le dérèglement du monde selon ses codes habituels : des personnages aux postures exagérément actives, des figures de cauchemars caractérisées par des gueules béantes effrayées ou effrayantes ; des physionomies déroutantes qui semblent à l’étroit dans les cases du dessinateur et veulent s’extirper de la page qui les emprisonne. Cette dynamique à l’œuvre créé un tumulte incessant qui ne laisse aucun répit au lecteur. La Terre elle-même subit les chocs de ces hordes en furie : roches brisées, éventrement des sols, écroulements, se succèdent sans fin… Ruines et artefacts du monde d’avant se régénèrent ainsi perpétuellement, tel est le chaos selon Jack Kirby !
Au début des années septante Jack Kirby revient chez DC après avoir connu chez Marvel une décennie créatrice sans précédent. Il a tout simplement mis-en-place la figure moderne du super-héros à travers la série Fantastic Four, co-créé avec Stan Lee. A partir de cette matrice l’univers Marvel se met peu à peu en place et chaque nouvelle série impose la « méthode Kirby » : Hulk, Thor, The X-Men, The Avengers… Tout aussi prolixe dans la décennie suivante ses créations connaitront moins de succès. Les 40 épisodes de Kamandi ont été initialement publiés en fascicule d’octobre 1972 à avril 1976. La publication du premier tome reprend les 20 premiers épisodes et offre à ce jour la plus belle édition en librairie d’une œuvre de Jack Kirby en respectant les couleurs, l’encrage et cette impression mate si caractéristique de son œuvre. Merci Urban !
Deuxième tome de Kamandi annoncé pour février 2014.
Bonne lecture !
Si vous avez aimé, du même auteur :
20 récits complets par le roi des comics
Urban Comics
Collection DC Anthologie
Pour approfondir l’œuvre de l’auteur :
Harry Morgan et Manuel Hirtz
Les moutons électriques éditeur,
Collection Bibliothèque des Mirroirs
2 Comments
Hello! Didier,
merci pour ta critique de ce film, que je viens de visionner avec grand plaisir.
En effet, le constat que tu fais est très juste; c’est de la belle ouvrage(acteurs, mise en scène, intrigue)mais ce n’est pas nerveux et percutant comme dans toutes les productions récentes.
Au moins cela nous change du cinéma popcorn, à peine consommé à peine oublié.
N’oublions pas, au même temps, que les quelques génies(Allen, Coppola, Scorcese) encore parmi nous n’ont pas été élevés à l’école du clip vidéo façon Mtv, donc forcément ce n’est pas la même approche…
Du coup là, j’ai presque envie de faire l’éloge de la lenteur au cinéma, ceux qui ont vu « Valhalla Rising » comprendront.
Ola Miguel,
Merci à toi pour ce commentaire, ça fait toujours de pouvoir faire découvrir un film et en plus d’être soutenu dans ses goûts 🙂
J’ai aussi adoré Valhalla Rising, c’est magnifique dans tous les sens du terme et ça ferait bien plaisir si tu faisais un article sur le sujet.
A plus!