Inutile de présenter Jean-Louis Aubert. Quelques mois suivant son « Roc éclair« , septième album solo aux contours plus graves que d’habitude, on savait que l’on aurait droit à une tournée digne de ce nom. Entouré par des musiciens rodés (notamment l’élégant Thomas Semence qui sait récolter le meilleur de sa six cordes, Richard Kolinka en roi des baguettes et la section cuivre qui donnait déjà à l’album un aspect plus fourni), Aubert, trois ans après son « tour sur lui-même » acoustique, a embrasé l’Arena de Genève. Au milieu d’une assistance aux âges confondus et une majorité de quadras bien fondue, qui a dit que Jean-Louis s’était mis au régime? Trois guitares, une basse, deux batteries, un clavier et des cuivres. Le Mick Jagger français, notre grande bouche nationale, bouche pleine d’enthousiasme, de joie et d’humour, déchaîné devant un public qui le lui rend bien: Aubert est un éternel gamin.
« La légende dit: vous avez l’heure, et nous on a le temps », l’idole ne croyait pas si bien dire. Deux heures trente de concert et trois rappels. Je crois que c’est cela que l’on appelle un artiste généreux. En quoi une tournée peut-elle être idéale, si ce n’est quand elle nous fait vivre des moments forts, des moments drôles et dans ce cas précis, des moments complices. En ce samedi 18 juin Aubert était notre ami, notre pote, notre copain, à tous.
Aubert (re)vient vers nous (« Maintenant je reviens », « Demain sera parfait », « Regardes moi ») guitare sèche, harmonica et chapeau: la marque des anciens. Ce qui frappe, c’est l’aspect triste de son dernier disque qui semble s’estomper en live, on est happé par autre chose, le Rocker au grand coeur oublie le mal de vivre et prend la vie comme elle vient. La magie Aubert opère en (déjà) trente minutes de concert. Le public est conquis, son « Alter ego » spectateur est prêt à le suivre, dans son coeur rien ne change, Aubert nous emmène « Ailleurs ». Le paradis, « les Plages », Jean-Louis connait le chemin par « choeur »; il sautille, blague et chante à « Ceux qui passent »… Bouille adolescente, habité par une énergie tout sauf indécente, l’artiste n’hésite pas à introduire son « répertoire téléphonique » qui n’a pas pris une ride. La folie s’empare de la salle. Celui ou celle qui ne connaît pas ses classiques aussi puissants qu' »Argent trop cher », « La bombe humaine » ou « ça c’est vraiment toi » est prié de quitter la salle. Personne ne trahira son hôte. Comme un Iphone colle à l’oreille des ados, le Telephone d’Aubert lui colle à la peau. On imagine un instant l’enfant Aubert, des idées pleins la tête lancer un « Papa, je veux être chanteur… » Non content de lui avoir fait des cheveux blancs, destinée cruelles du métier de parents, le rockeur rend à son paternel un hommage poignant. « C’est con mais c’est bon », « Demain, là-bas, peut-être », « Loin l’un de l’autre »: on sait ce qui se cache derrière, c’est l’amour éternel d’un fils à son père. Et c’est sans doute sur les versions rallongées de « Locataire », « Temps à nouveau » ou « Juste une illusion » que l’on a pu mesurer la bonne humeur ambiante de la troupe, là où des jams de folies et des allusions à Dylan, aux Stones et aux Doors non anodines ont pris l’ascendant sur la rigueur envolée d’une set-list traditionnelle. Les émotions, où qu’on les cache, Aubert sait les trouver. Et c’est au bout d’un troisième rappel, la guitare sur l’épaule, qu’Aubert nous laisse le sourire aux lèvres. Allez, encore un petit effort, pour des vieux et des jeunes nostalgiques, la reformation de Telephone n’est plus très loin. Désormais, on n’a plus à rêver d’un autre monde.
(source photo: 20minutes.ch)
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