L’annonce du décès du chanteur, après une année de combat contre le cancer, le 10 janvier dernier a retenti comme un coup de tonnerre dans les médias du monde entier, cela d’autant plus que Bowie venait à peine de faire paraitre son nouvel album « Blackstar ».
L’occasion m’est donc donnée de revenir sur quelques albums essentiels, jalons dans une carrière riche en rebondissements et toujours en perpétuel mouvement.
Certes il existe bien un « Best of »(« Nothing has changed ») enfilant-telles des perles- les titres(hits) phares, de manière plaisante, mais le parcours du bonhomme s’est quand même construit sur la durée et les albums(que la Fnac propose actuellement à prix « doux », soit: 12,90) :
1964/1969 DES DEBUTS FORMATEURS:
A l’instar de son copain de galère et futur rival de la période « glam » Marc Bolan(John’s Children), Bowie, qui s’appelle encore David Jones, joue dans des petits groupes sans lendemain; Lower Third, Mannish Boys, les deux compères trainent dans Carnaby Street, tantôt « mods » tantôt chanteurs de folk. Bowie tâte même de la variété, et du mime avec Linsay Kemp. L’influence de Jacques Brel, par le biais des reprises de Scott Walker, ainsi que celle du Velvet Underground, sont déjà là. Dans la grande révolution « pop » des années 60, le jeune Bowie développe sa capacité à synthétiser les courants d’avant-garde artistiques, musicales pour en faire quelque chose d’unique.
Un premier album est publié chez Deram, en 1967, simplement intitulé « David Bowie » mélange de chansons pour les enfants et de variété, c’est un flop.
A noter que c’est à partir de ce moment que le jeune David Jones prend le pseudonyme de David Jones pour éviter toute confusion avec le chanteur américain des Monkees; Davy Jones.
En 1969, inspiré par les premiers pas de l’homme sur la lune et par la science fiction, en particulier « 2001(…) » de Kubrick, il décroche enfin un hit avec le morceau « Space Oddity ». On verra, la passion pour la SF est récurrente chez Bowie mais aussi chez beaucoup d’artistes des 60’s(Jimi Hendrix, notamment). L’album « Man of words, man of music » dont est extrait « Space Oddity », oscille entre folk dylanienne et variété, il est cependant déjà produit par Tony Visconti, un homme qui va compter dans la carrière de Bowie. Avec le succès le disque ressort sous le titre éponyme.
1971: « CHANGEMENTS » & « MUSIQUE AU POIL* »:
Avec « Hunky Dory » Bowie fait un pas de côté vers ses influences folk et rend tour à tour hommage à Bob Dylan »Song for Bob Dylan », Warhol ainsi qu’à Lou Reed(« Rock Bitch »). Sans oublier « Changes » et le sublime « Life on Mars », remake ambitieux de « Space Oddity ».
1972/1974: ZIGGY ROI DU GLAM(OUR):
« Rise and fall of Ziggy Stardust »/ »Aladdin Sane »/ »Pin-Ups »/ »Diamond Dogs »
C’est la grande période du rock dit « décadent » à paillettes. Marc Bolan, Roxy Music et Gary Glitter et les Sweet dominent les charts.
Avec Ziggy Stardust, Bowie crée un personnage venu de mars, avec son groupe The Spiders.
Habilement Bowie joue sur l’androgynie et affiche sa bisexualité. Costumes flamboyants, cheveux orange(préfigurant le punk!). Masques, maquillage, la théâtralité dans le rock esquissée par Jim Morrisson avec les Doors est à son apogée (ailleurs un Peter Gabriel multiplie ses mises en scène au sein de Genesis).
Aux yeux du public le créateur se confond avec sa créature à tel point qu’à la fin de la tournée au cours du tout dernier gala, le 3 juillet 1973, lorsque Bowie annonce que : « C’est le dernier concert qu’il fera à tout jamais », le public présent croit à la fin de sa carrière tout court. Quand à son groupe, interloqué, il découvre ainsi la décision de Bowie de mettre fin à leur collaboration.
Avant ça, Bowie aura sorti « Aladdin Sane » dans le prolongement de « Ziggy », un lp dominé par les envolées de piano de Mike Garson. Les temps forts en sont « Jean Genie » en hommage à l’écrivain Jean Genet, puis vient l’album constitué de reprises « Pin Ups », une déclaration d’amour, à Syd Barrett, les Pretty Things, les Who, Easybeats. Sans oublier, Iggy Pop, dont il produit le « Raw Power », ainsi que l’album « Transformer » de Lou Reed. Et même le morceau « All the Young Dudes » écrit pour Mott The Hoople.
1974: ANNEE NOIRE: ORWELL ET LA TRANSITION VERS LA SOUL:
« Diamond Dogs »
Bowie a tourné la page « glam » et l’épisode Ziggy. Sans son fidèle guitariste, Mick Ronson, il se lance sur un projet d’album concept autour du 1984 de Orwell, les ayant droits s’opposent et le projet tombe à l’eau, reste le disque, sombre et magnifique porté par un Bowie accro à la cocaïne, époustouflant à la guitare(« Rebel Rebel »), « Future Legend » donnant la le la de la période funk à venir.
1975/1976: L’AMERIQUE et la « Blue eyed soul » du Thin White Duke:
« Young Americans »/ »Station to Station »
Fan de musique noires depuis toujours, Bowie, plonge de plein corps dans le « Philly Sound », rencontrant l’idole John Lennon avec lequel il co écrit « Fame », d’ailleurs le morceau titre cite « a day in the life »). Son style de soul blanche « Blue Eyed Soul » fait des merveilles et fera des émules.
Avec « Station to station » la soul de Bowie prend un tour plus robotique. « Golden Years » initialement prévu pour Elvis Presley, ainsi qu’une émouvante reprise de « Wild is the Wind » de Nina Simone viennent compléter le tableau. Côté visuel, le théâtre berlinois de l’entre-deux guerres imprégnè le look du « Maigre Duc Blanc ».
C’est d’ailleurs justement vers Berlin que Bowie va se tourner, lorsque la période américaine sera close,
En 1975, pendant son séjour, Le chanteur a tâté du cinéma avec « L’Homme qui venait d’ailleurs » de Nicolas Roeg.
1976/1979: LA TRILOGIE BERLINOISE:
Fuyant le cauchemar urbain de Los Angeles et son addiction à la coke, Bowie s’installe en compagnie de Iggy Pop à Berlin, attiré par l’influence des musiciens allemands de la scène « Kraut-rock », tels que Neu, Can, et Harmonia et bien sur Kraftwerk. Ce courant musical se caractérise par les rythmiques hypnotiques et répétitives que l’on retrouvera dans les musiques électroniques plus tard.
Aidé par le producteur Brian Eno, Bowie produit 3 albums: « Low »/ »Heroes »/ »Lodger ».
Tous trois alternent chansons et morceaux instrumentaux, Bowie est en phase avec la new wave.
« Lodger » plus conventionnel, apporte le influences « world music », que Eno exploitera ultérieurement avec les Talking Heads.
Très productif avec Iggy Pop, il remet le chanteur sur pied et compose et supervise deux albums « The Idiot »(1976) et « Lust for Life »(1977).
« Scary Monsters »(1980).
Cet album et son tube « Ashes to ashes », synthétisent les travaux berlinois.
1980/1986: LA SUISSE & LES ANNEES MTV:
« Let’s Dance »(1983)/ »Never let me down »(1984)/ »Tonight »(1987):
Avec ces albums, Bowie range au placard les personnages(tout en étant, paradoxalement plus actif au cinéma) et endosse le rôle de « Homo ordinaris ».
Signalons au cinéma son rôle dans « Furyo », « Les Prédateurs », et « Labyrinthe ».
« Let’s Dance » est produit par Nile Rodgers de Chic et on trouve même le grand Stevie Ray Vaughan aux guitares, notamment sur une relecture du « China Girl », un morceau déjà paru sur un album d’Iggy Pop.
1987: RUPTURE DE STYLE avec THIN MACHINE:Sans doute lassé du côté trop policé et commercial des années 80, Bowie brouille les cartes en se présentant au sein d’un groupe, qui plus est axé sur les guitares bruyantes. Le disque est très fraichement accueilli par la critique et le public.
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