Légende germanique datant du XIIIe siècle, Les Nibelungen inspira plusieurs œuvres littéraires et musicales, notamment les célèbres quatre opéras de Wagner. Se basant sur ces derniers, Alex Alice reprend à son compte ce mythe ancestrale, en se consacrant essentiellement au personnage de Siegfried. Fils d’un mortel et d’une déesse, Siegfried est recueilli par Mime, un nibelung, après la mort de se parents, tués par Odin. Isolé pendant des années, il ne va pourtant pas pouvoir échapper à son destin bien longtemps et une walkyrie prophétique ne tardera pas à réveiller le héros qui sommeil en lui. Auteur talentueux du Troisième Testament, Alice nous aura fait attendre quatre ans avant de nous livrer ce chef-d’oeuvre total qu’est Siegfried. Prévu en trois actes, l’intrigue obéit aux codes de l’épopée fantastique et traite de thèmes universels, tels la vengeance, l’amour, le courage, la colère, l’amour-propre, etc. Le récit n’est pas pour autant figé, bien au contraire. Siegfried devient vite un personnage extrêment attachant et familier. La narration et le découpage vont également dans ce sens. Le savoir-faire d’Alice lui permet de varier sans mal entre planches à la composition classique et cases libres de tout cadre. Ce contraste crée ainsi un rythme tantôt calme, tantôt énergique, qui correspond aux divers stades par lesquels passe notre héros. Mais la claque la plus incroyable de cette série reste le graphisme. Déjà aboutie dans Le Troisième Testament, le dessin d’Alice prend ici une toute autre dimension : plus fin, plus tranchant, plus expressif. Les couleurs relèvent aussi ici de l’exploit. Travaillées, certes, sur Photoshop, elles n’en restent pas moins vertigineuses de beauté et de nuances. En témoigne facilement la première planche de l’ouverture, qui mériterait d’être encadrée et exposée dans un musée. Grand de sa maîtrise exemplaire, Siegfried ne redéfinit pas les règles de la fantasy, mais les porte à leur apogée.
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