Recovery: comprendre convalescence. Eminem n’a pas la couleur de sa musique, mais il a certainement plus d’atouts que les autres. Fini les baggys trop grands et les casquettes à l’envers. Il paraît que plus le pantalon est large et plus l’homme est fort. Là c’est le cas; on ne parle pas de muscle ni de téstosthérone, n’en déplaise aux gros bras de 50cent, mais bien de rap hargneux. Les fringues larges sont aux blessures ce que le cache misère est aux rides du coin de la bouche. La gueule ouverte, ça crache, ça jure, ça dépotte ce flow légendaire. Mesdames messieurs, le maître (blanc) du genre: Eminem.
Après un quinquennat plus que pauvre en production (un best of tiré par les cheveux en 2005, Relapse en 2009) et quelques désintox plus ou moins fructueuses, le roi du HipHop est de retour en forme. Du talent? toujours. De la classe? plus que jamais. De la sobriété? Oui, voir même du style, de la maturité. Et pourtant, on avait laissé le Slim-shady au bord d’une route poussièreuse, perdu dans « sa » brume, le cerveau et la vision du monde troublés par des surdoses d’à peu près tout ce qui se gobe. Alcool, Amphèt, Extasie, Marijuana…. le rythme de rock star quoi… N’est pas Keith Richards qui veux, le blondinet de Detroit a vu sa vie défiler et son talent lui échapper.
En 2009 sort « Relapse ». Avis mitigé. On sent Eminem encore un peu tremblant, mais le disque se vend grâce à sa recette du « single qui parodie les gens de l’actu et qui fera rire l’Amérique… et les autres » (« We made you »). Certes le titre et l’ensemble de l’album portent la griffe du gamin qui surpris le monde du rap à l’aube du 21ème siècle. Mais il faut vivre avec son temps, les rappeurs en souffrent en général, se vautrent en vieillissant (50cent encore lui, Snoop Dogg…) et on s’avoue à demi mots que la guerre des « coasts » a peut être sauvé le marché du disque en précipitant le fauchage de futures has been (2Pac, Notorious Big). Fini, ou plutôt vive la soupe (le bad boy carbure aux légumes dorénavant). Eminem publie un album époustoufant qui fera date. « Recovery », c’est « sa » convalescence, sa renaissance. Surprise, pas de single poilant, envolés les sosies de Sarah Palin qui chevauchent des ours. Eminem est au bord du vide, « même pas peur » (« Not afraid »). D’entrée il tabasse ses vers comme un métalleux maltraiterai sa 6 cordes: « Cold wind blows » respire le futur du hip hop, les compos personnelles font battre le coeur de l’album.
En général, les invités sont roi, pas de chance, Eminem les surpasse plutôt facilement (Pink sur « Won’t back down », Lil Wayne sur « No Love », Rihanna sur « Love the way you lie »). La perfection n’existerait pas sans quelques légers défauts, quelques chansons à oublier: ici ça concerne le duo avec cette chère Rihanna qui transpire le besoin de reconnaissance, comme si la course au succès entre elle et Lady Gaga passait par Detroit. Marshall accepte, sans rechigner, après tout… Cerise sur le gateau, le titre produit par le mentor Dr Dre, « So bad », réunit tous les ingrédients d’un morceau d’anthologie. Eternelle reconnaissance au docteur donc. Le nouveau Eminem nous séduit, ça faisait longtemps qu’on avait plus entendu un aussi bon album de Hip Hop. On a le sentiment que cette fois c’est bien lui le boss. Comment reconquérir un public? Demandez-lui…
Extrait à écouter ici: Eminem, « Not afraid »
Laisser un commentaire