Romans de l’ère victorienne et adaptations cinématographiques:
Depuis quelques années les romans de Jane Austen et des sœurs Bronté sont largement adaptés au cinéma et à la télévision(BBC), citons notamment « Raison et sentiments », « Orgueil et préjugés » ou encore le « Jane Eyre » de Charlotte Bronté, dont il existe une version de 2006 par la BBC ainsi qu’un film de Cary Fukunaga, paru en 2011 avec Mia Wasikowska et Michael Fassbender, occasion donc, de nous intéresser à la réédition d’une magnifique version avec la participation du génie Orson Welles.
L’histoire de Jane:
Enfant, Jane Eyre(Joan Fontaine) est une orpheline élevée par sa tante, par la suite est placée dans un orphelinat, digne d’une prison. Hormis le médecin, sa seule amie, étant Helen Burns(Elizabeth Taylor!), qui décédera d’une pneumonie après que les deux pensionnaires aient été punies à marcher en rond sous la pluie battante.
Arrivée à sa majorité, on propose à la jeune fille de travailler dans cette institution, pour un salaire moindre. Jane Eyre ne sentant pas le moins du monde redevable, refuse l’offre-malgré le chantage-et part chercher un employeur par ses propres moyens. Elle sera engagée comme gouvernante chez les Rochester pour s’occuper de la petite Adèle(Margaret O’Brien), une vivace fillette passionnée par la danse avec laquelle elle s’entend à merveille.
Par contre, elle ne voit que très peu l’ombrageux et colérique maître des lieux, souvent en voyage. Malgré son animosité, Edward Rochester(Orson Welles), ne tarde pas à tomber amoureux de Jane. Malgré les convenances, qui auraient voulu qu’il épouse une femme de son rang comme Blanche Ingram(Hillary Brooke), Rochester demandera en mariage Jane. Pourtant, Rochester et sa demeure cachent un secret et parfois dans la nuit éclatent des cris épouvantables venus d’une aile non habitée du château…
Jane Eyre par Robert Stevenson: un bijou gothique/expressionniste:
Meilleur film d’un cinéaste habituellement peu inspiré(hormis son travail pour Disney), ce Jane Eyre bénéficie d’une photographie et de plans au clair obscur dramatiques dignes d’un « Nuit du Chasseur », pour situer. Le scénario ayant été confié à pas moins qu’à l’écrivain Aldous Huxley qui a su garder les éléments essentiels du récit et la musique à Bernard Herrmann, compositeur attitré d’Alfred Hitchcock.
Orson Welles n’est pas crédité à la mise en scène, mais de nombreux plans et cadrages laissent supposer son implication ou tout au moins son influence sur Stevenson, certains cadrages évoquant « La splendeur des Amberson ».
Welles, très maquillé(il me fait penser à son interprétation de Othello) y est possédé et son jeu contraste avec la douceur du personnage interprété par Joan Fontaine. Pas mal de scènes d’anthologie notamment la rencontre inopinée dans la nuit et le brouillard de Rochester manquant d’écraser Jane et tombant de son cheval.
A une édition de qualité viennent s’ajouter de précieux bonus: « dans l’ombre d’Orson Welles », qui nous situe bien le contexte de « Jane Eyre » dans le parcours du cinéaste, homme de théâtre aguerri et cinéaste-déjà-en conflit avec le système hollywoodien. Plus intéressant encore « Jane Eyre et la littérature anglaise » qui rappelle la place particulière des femmes dans le contexte victorien; mal vues dans un métier réservé aux hommes(les héros de Dickens par exemple sont toujours masculins)et scandaleuses de décrire avec force leurs passions et sentiments, voire leur révolte comme dans Jane Eyre. Et pour conclure « Jane Eyre sur grand écran ».
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