Alors que le marché de la BD est en stagnation, voire en baisse dans certains secteurs, la collection KSTR, elle, continue à prendre des risques, à expérimenter et à innover, qu’elles que soient les ventes. On lui doit notamment la grande révélation de Bastien Vivès et les découvertes de Will Argunas et Antoine Ozanam. Avec plus de soixante titres à son catalogue et huit nouveautés à paraître d’ici la fin août 2012, cette extension « Jeunes talents » de Casterman surprend toujours et creuse encore un sentier jusqu’ici évité par les éditeurs, par peur du manque de retours sur investissements. Et heureusement que KSTR est là, car quand les générations Blake et Mortimer et consorts ne seront plus là, il faudra bien quelqu’un pour prendre la relève et revoir le concept même de bande dessinée, avec des nouvelles thématiques, des techniques novatrices et des limites abolies. Bref, tout ça pour vous parler du Fléau vert, nouvel album de la fameuse collection KSTR, signé Michaël Sanlaville, qu’on avait déjà vu aux côtés de Bastien Vivès (encore lui !) sur Hollywood Jan.
Murphy, beau mec un peu macho sur les bords, mène une vie sans souci avec son gros 4X4, jusqu’à ce qu’une plante carnivore envahisse la Terre ! Petite particularité de ce végétal : il ne se nourrit que des organes génitaux masculins humains. La planète ne tarde donc pas à être vidée de sa gente masculine. Un ordre féminin se met alors en place et recueille notre brave Murphy qui a survécu grâce à un camion rempli de plats surgelés… et il est le dernier homme ! Après un enthousiasme tout passager, il va vite réalisé que cette nouvelle civilisation est menée par une dominatrice un peu trop barrée à son goût et que faire de vieux os ici ne serait pas une si bonne idée. Accompagné d’un transsexuel, d’un jeune Africain et d’une fille « pure », il va essayer d’échapper à cette folie organisée. Mais la plante rôde toujours…
Ça, c’est du scénar’ ! C’est frais, novateur et sacrément dynamique. Le mythe du dernier homme n’est certes pas une nouveauté, mais son traitement ici est tellement déjanté et justifié, que la lecture se fait savoureuse de bout en bout. Mélange de récit humaniste, de science-fiction et de culture pop (Akira, y es-tu ?), Le fléau vert est un album aux multiples facettes, qui ne se perd jamais dans l’une ou dans l’autre. L’équilibre des points de vue et des séquences d’action et de psychologie crée un ensemble étonnant, parfois bancal, mais toujours cohérent. Sanlaville ne prend jamais partie pour ou contre les hommes ou les femmes, mais plutôt contre la folie, la manipulation des masses et toutes formes de misandrie et de misogynie. Des causes nobles qu’il dilue dans une aventure divertissante à souhait, au rythme toujours plein de souffle et au final étourdissant. Le découpage très cinématographique est très énergique et donne une fluidité par moments épileptique, par moments calmes. N’oublions qu’il s’agit d’une premier BD et que le niveau est déjà bien haut !
Le fléau vert est donc une nouveauté qui décalque pas mal et dépoussière un peu le paysage actuel de la BD. Sanlaville n’est pas le seul dans ce cas et c’est tant mieux. Il y a quelque chose de rafraîchissant au royaume de la BD !
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