N’importe où, n’importe quand, les hommes en bleu sont limites plus redoutés que les petits hommes verts. Surement parce qu’avec les képis, on sait à quoi s’en tenir. Des gestes peu gracieux, des ballons infiniment durs à gonfler, des taux toujours plus bas, des quotas toujours plus hauts… La police nationale gâche bon nombre de départs en vacances et de sorties de boîtes. Et le pire, c’est que c’est pour notre bien. Cette frange bleutée là, on ne l’aime pas, et ça ne s’arrangera pas. Comme dans tous les polars et ce depuis la nuit des temps, ceux qui déchaînent l’enthousiasme, ce sont les bad-boys; et dans Braquo on est servi, au point de ne plus trop savoir où la limite se situe. Bons ou mauvais? La loi de la jungle ne change pas, elle mute.
Banlieue parisienne, de nos jours: l’épicentre de l’action. Avec Braquo (braquage en argot urbain), le réalisateur Olivier Marchal (« 36 quai des orfèvres », « Les lyonnais », « MR73″…) n’a pas seulement signé la meilleure série policière française, mais il nous plonge dans le quotidien d’une équipe de terrain de la PJ, un jour le jour sombre et cru où le suicide peut surgir chaque minute. Marchal sait de quoi il parle, du titre extrêmement bien choisi – la trame principale « Braquo » est ultra respectée du début à la fin - aux méthodes pas toujours blanches des mecs du milieu. Et en formant son équipe, il a choisi de vrais gueules. Jean-Hugues Anglade – à qui la cinquantaine sied particulièrement bien – en chef de meute (Eddy Caplan), Nicolas Duvauchelle (Théo Wachewski), Joseph Malerba (Walter Morlighem) et la très racée Karole Rocher (Roxanne Delgado): une brochette d’écorchés qui ne font plus la différence entre le jour et la nuit. Métro-boulot-dodo se conjugue en planques-interrogatoires-insomnies au sein de cette brigade pour qui la brume ne semble jamais vraiment se lever.
Et tout commence… mal. Le suicide d’un collègue victime de l’IGS et une contre-enquête censée laver leur honneur mais qui tourne à l’horreur poussent Caplan et ses hommes de l’autre côté de la frontière entre le bien et le mal. Rapidement, on comprend la préférence de ceux qui ont prêté sermon: mourir ou moisir? Dans un engrenage souvent mortel, l’amitié et l’instinct vont guider les pas de nos ripoux, qui veulent à tout prix éviter la taule. Hold-ups, coup fourrés, voitures et identités maquillées… Plus les épisodes passent, et plus le dénouement semble compromis. A vrai dire, pactiser avec le diable n’enlève nullement l’envie de le fumer, mais pour nos quatre protagonistes, il va falloir jouer serré, la main sur le holster prête à dégainer. Marchal n’oublie rien et comme dans chacun des ses films, met l’accent sur le côté humain.
Ces années judiciaires 2010 n’ont rien à envier aux « exploits » d’un Mesrine car depuis trente ans, la guerre s’est étendue et Braquo en est le meilleur point de vue.
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